SWFObject embed by Geoff Stearns (basic) @ deconcept

dimanche 21 novembre 2010

Lundi 15 novembre 2010. 22h10.

Ce sont les derniers jours. Pour le livre et le reste. Je continue. J’avais un rendez-vous le soir avec l’anesthésiste. J’ai rejoint Amélie à Duroc. La pluie nous a surpris juste comme nous nous retrouvions. Une averse drue, glacée, interminable. Nous sommes arrivés trempés à la clinique. La seule bonne nouvelle en sortant, c’est qu’il ne pleuvait plus. Tu veux bien qu’on s’arrête chez Péret boire un verre ?

Lundi 15 novembre 2010. 1h20.

Travaillé encore toute la matinée. Dernier déjeuner ensemble. Décidemment, je n’aurai fait ici que des apparitions à table. Nous avons bouclé les valises. Embrassé Marion, Jérôme. Emmanuel m’a flanqué une bourrade émue. Sursum corda ! Claire nous a conduits jusqu’à la gare d’Antibes. Sur le chemin, nous nous sommes arrêtés une demi-heure pour rendre visite à la grand-mère d’Amélie à son centre de repos. J’ai travaillé pendant le voyage. Comme j’ai pu. Dans le wagon, juste à côté de nous, une jeune personne de pas vraiment deux ans avait décidé de ne surtout pas dormir. Je l'entendais derrière mes boules Quiès : Frère Jacques, Frère Jacques...

Samedi 13 novembre 2010. 23h50.

Nous sommes allés faire un tour jusqu’à la librairie de Jean-Paul à Chateauneuf. Ses affaires vont mal. Très mal même. Mais il se bagarre avec une belle énergie. Ne t’inquiète pas, je serai toujours là pour la signature de ton bouquin. Tu as bientôt fini ? – Oui, je crois. Encore quelques pages. Dîner aux Margouillats avec Marie et Jacques. L’oncle Patou aussi. Poulet au fenouil avec un aiolli. Jacques est sorti un moment sur la terrasse. Je l’ai rejoint. C’est vrai qu’il est médecin… Il m’a réconforté prudemment sur ce qui m’attend. Le chirurgien ne te dit rien ?

Vendredi 12 novembre 2010. 23h15.

J’ai l’impression de rattraper tous les moments perdus. Ici, je suis hors temps et le livre avance. Je me laisse porter jusqu’à la nuit tombée. Bon, maintenant, j’arrête... Nous étions tous invités à dîner à la Ferme. Chez Véronique et François.

Jeudi 11 novembre 2010. 22h20.

J’ai rédigé ma chronique pour Next. J’y parle des Mamelles de Tirésias. La pièce d’Apollinaire, mise en musique par Poulenc sera à l’Opéra comique à la fin de l’année. J’avais monté la pièce avec Patrice lorsque j’étais en terminale. Je jouais le rôle de Thérèse/ Tirésias. Lui le rôle du mari. Et puis chantez matin et soir/ 
Grattez-vous si ça vous démange/ 
Aimez le blanc ou bien le noir/ 
C’est bien plus drôle quand ça change
/ Suffit de s’en apercevoir
. Nous avions même fait une petite tournée. J’en garde le souvenir d’une joie nouvelle. D’une infinie liberté. Jean-Pierre que je n’ai pas revu lors de son séjour en France le mois dernier m’a fait parvenir une vidéo réalisé à partir de films super 8 de cette époque. J’ai seize ans ou dix-sept ans...

Mercredi 10 novembre 2010. 23h50.

Travaillé. Je suis au calme à ce bureau. Derrière la fenêtre, les collines. Le ciel s’est levé bleu et l’est resté toute la journée. Amélie est allée chercher Marion et Jérôme à l’aéroport de Nice. A peine poussé la porte et posé la valise, Jérôme a annoncé à ses parents la grande nouvelle. Ils attendent un bébé. Nous avons débouché le champagne. Nous aurons tenu le secret un mois. Camille aussi. Elle l’avait même su en premier. Je me souviens de leur coup de fil à Mexico. Comment je vais réussir à garder ça pour moi ? C’est elle qui sera la marraine.

Mardi 9 novembre 2010. 22h00.

Le train a été bloqué en rase campagne peu de temps après le départ. Nous sommes arrivés à Antibes avec une bonne heure de retard. Claire et Emmanuel nous attendaient à la gare. Ensemble. Ils revenaient de la maison de repos où se trouve en ce moment la grand-mère d’Amélie. Problèmes d’intendance, trajets quotidiens. Inquiétude surtout. Je les ai trouvé épuisés, mais ils ne laissent rien paraître. Déjeuner tardif. Nous avons pris nos quartiers dans la chambre du haut. Tour du jardin. Les oliviers sont couverts d’olives. J’ai une petite semaine pour travailler.

mardi 9 novembre 2010

Lundi 8 novembre 2010. 23h20.

Bourrasque ce matin. Le vent a secoué les feuilles du figuier et de la vigne vierge. Celles qui restaient encore ont été arrachées dans l’averse de grêle qui a recouvert de blanc tout le jardin en un instant. Vilaine saison. Nous sommes allés dire au revoir à Georgette. Amélie lui avait cueilli les dernières roses aux Fontenelles. Le potager est un fouillis d’herbes hautes. Vert, marécageux. Elle en a extirpé des courges, un bouquet de poireaux. Retour somnolent à Paris. Défait et refait les valises. Demain nous partons quelque jours à Magagnosc. Mon livre à finir. Des papiers à écrire. Nous avons passé la soirée avec Delphine et Françoise-Marie. Cela m’a fait un bien fou de les voir. Et ensemble, et chacune. Et surtout en ce moment.

lundi 8 novembre 2010

Dimanche 7 novembre 2010. 22h15.

J’ai travaillé comme j’ai pu. Et comme je peux, j’avance. Georgette est venue déjeuner. Amélie avait fait un gigantesque soufflé au comté, relevé de muscade râpée.

Samedi 6 novembre 2010. 23h30.

Nous avons fait le marché sous une pluie battante. Passés déposer ses courses à Georgette. Elle avait rédigé une longue liste, sachant que nous ne serons pas de retour avant un moment. Déjeuner tardif. Je me suis remis au livre. Trois jours sans une ligne. Je peine… Nous étions invités chez Monique et Jean-Pierre. Il y avait là, deux couples de leurs amis. Florence et François-Xavier (Lui, dirige l’ensemble du chantier de désensablement de la baie du Mont-Saint-Michel…), Cornelis et Marie-Aude. Parlé, à table, d’édition et de prix littéraires. Du grand chantier du Mont et d’ordures ménagères. Evité, en bonne compagnie, les sujets qui fâchent : la politique, les grèves... De justesse.

vendredi 5 novembre 2010

Vendredi 5 novembre 2010. 23h50.

Départ tôt pour Le Havre. J’y allais retrouver les élèves de David, au collège Eugène Varlin, pour une deuxième année. Les mêmes (à trois nouveaux près…) qu’en quatrième. Bête à dire : je les ai trouvé grandis. Nous voilà partis pour une nouvelle aventure d’écriture. J’en suis bouleversé et ravi. La journée avec eux a passé comme un souffle. J’ai rejoint Amélie gare Montparnasse. Nous étions à Carolles à la nuit noire.

Jeudi 4 novembre 2010. 23h10.

J’ai annoncé aux étudiants que je serai absent quinze jours à la fin du mois. Ils en profiteront pour écrire leur reportage. D’ici là, je leur ai proposé un petit galop d’essai. Rédiger un court texte autour d’une anecdote du quotidien, d’une rencontre, d’une scène de rue. - Mais quoi par exemple ? Soyez juste curieux. Il se passe tant de choses. Des gens qui râlent aux caisses du Monoprix. Une sortie d’école. La fourrière enlevant des voitures mal garées. Une conversation entendue dans un café. Des amoureux qui s’embrassent. - Il faut leur poser des questions aux amoureux ? Vous pouvez essayer... Déjeuner dans un bistrot italien de la rue Claude-Bernard. J’ai revu mes notes pour Jeux d’Epreuves. Les deux émissions se sont bien passées pour les livres que je défendais. Délaissé de Fred Léal (P.O.L.) et surtout Délires d’André Baillon (La Renaissance du Livre). Baillon, cet auteur belge si peu connu en France. Dévoré de folie, de mots fous et désespérés. Baillon sans cesse à bout, suicidé en 1932. Je suis rentré en taxi avec Joseph. Rejoint Amélie à la librairie d’Olivier Renault, L’arbre à lettres, rue Boulard. Sébastien Lapaque y dédicaçait l’édition poche de son livre paru chez Stock en 2004, Chez Marcel Lapierre, magnifique éloge d’un morgon « nature », vinifié sans SO2, ni levurage. De vignes cultivées sans engrais chimiques, ni désherbants. Sébastien écrit volontiers sur le vin et la bonne chère. Mais il est aussi (et surtout…) un spécialiste de Bernanos et un romancier des derniers retranchements… Nous ne nous étions pas vus depuis un moment. Nous avons bu quelques verres, partagé un rien de désabusement. On peut encore y croire... Retour à la maison. Amélie a appelé Victoria, au Mexique. Elle a six ans. Pour son anniversaire, nous lui offrons un poisson rouge. Clémentine va l’emmener le choisir. Victoria a promis qu’elle lui trouverait vite un nom.

Mercredi 3 novembre 2010. 22h45.

Préparé Jeux d’Epreuves. Demain, j’enregistre deux émissions à la suite. Revu aussi mes cours pour les étudiants. Les mercredis sont mes jeudis par anticipation…

Mardi 2 novembre 2010. 23h00.

J’ai écrit à mes cousines. Josette, Agnès et Françoise. Quoi dire, sinon qu’on est triste et que les souvenirs se bousculent. Comme ceux de cette journée où mon oncle Henri m’avait emmené visiter Lille. J’avais huit ans. Il était venu me chercher rue d’Avelghem de bonne heure le matin. Trajet dans le Mongy. Un café crème et un croissant du côté de la Grand Place. Et puis nous avions marché. Il faisait le guide. La vieille bourse, l’opéra, le Rang du Beauregard, le palais Rihour. Tu dois avoir faim… Je me rappelle encore que le restaurant se trouvait rue des chats-bossus et que j’avais eu le droit de tremper les lèvres dans sa Trappiste. L’après-midi, nous étions allés au musée des Beaux-Arts. Il m’avait montré les Goya : « La lettre ou les jeunes », « Le temps ou les vieilles ». Tout passe vite, tu vois… J’ai continué mon texte. Pierre est venu dîner. C’était prévu depuis longtemps.

mardi 2 novembre 2010

Lundi 1er novembre 2010. 23h40.

L’automne du peuplier sur un grand ciel tout bleu. D’azur au semis de feuilles d’or. J’ai cru voir un blason. Héraldique du matin. Nous sommes allés au cimetière déposer les fleurs de la Toussaint sur la tombe de Maman. Travaillé un peu. Rassemblé les affaires. Nous avons pris le train de cinq heures à Granville. Et Georgette a appelé. Mon oncle Henri est mort. On l’a retrouvé chez lui allongé sur son lit. Sur la table, son verre de bière qu’il n’avait pas fini. Il avait quatre-vingt-sept ans.

lundi 1 novembre 2010

Dimanche 31 octobre 2010. 23h50.

J’ai travaillé. Mon texte en ce moment m’a tout l’air d’un château de cartes qu’un mot de travers peut écrouler. J’hésite. J’attends. Un verre chez Georgette. Nous y avons croisé Josette de retour d’un court séjour dans le Nord. Elle avait ramené pour nous de l’ail fumé d’Arleux. La tresse se conserve une petite année sans problème. Mais nous l’aurons finie avant. On te dois combien ? - Penses-tu, rien. Noëlle est venue dîner à la maison. Terminé la soirée en écoutant des disques des années soixante-dix. Donovan, Léonard Cohen, les Beatles. Once there was a way to get back homeward/ Once there was a way to get back home. Oh, la la…

dimanche 31 octobre 2010

Samedi 30 octobre 2010. 22h00.

Tôt ce matin, la voiture de Séverine a percuté, de plein fouet, un sanglier égaré sur la chaussée d’autoroute. C’est Gérald qui conduisait. Agathe était à l’arrière dans le siège bébé. Ils partaient rejoindre les deux garçons chez les grands-parents. La voiture n’est plus qu’une épave, mais ils sont indemmes. Agathe passe décidemment bien du temps à l’échapper belle. J’ai écrit. Je me réimprègne doucement. Amélie a travaillé ses revues de presse. Cuit des gâteaux pour Georgette. Nous avons fait du feu. La maison devient à nouveau tiède.

Samedi 30 octobre 2010. 2h40.

Trois semaines que nous n’étions pas venus. Nous avons retrouvé le jardin dans une douce sauvagerie d’abandon. Cyclamens et lépiotes envahissant l’herbe au pied des sapins. Feuilles mortes poussées en tas par le vent aux encoignures de la terrasse. Les dahlias couchés. Dans la maison, l’humidité froide des portes restées fermées. Nous sommes passés voir Georgette. Des nouvelles du Nord. Mon oncle Henri ne va pas fort. Il ne sort plus. Marche à peine. La chambre, le salon, la fenêtre. Je voulais aller le voir cette année. Cela est resté un vœu pieux. Dîner à Donville. Nous étions invités chez Marie-Dominique et Bernard que nous avions rencontrés en juillet à bord du Lys Noir. Ils habitent une grande maison moderne, près du cimetière. Epais tapis et parquets clairs. Tableaux récents aux murs. Nous étions passés chercher Nicole à Jullouville, Thierry à Saint-Pair. Retrouvé là-bas Jean-Luc. Fait la connaissance de Florence qui est commissaire priseur à l’hôtel des ventes de Granville. La soirée s’est terminée tard, dans des conversations à tâtons sur la région, les livres… Des bribes d’histoires intimes. Jean-Luc est resté très silencieux. Je l’ai trouvé fatigué, triste. Mais j’ai, en ce moment, une acuité à la moindre inquiétude. Et au moindre chagrin.

vendredi 29 octobre 2010

Vendredi 29 octobre 2010. 11h30.

J’ai posté la lettre de condoléances avant de partir à la gare. Le vieux M. Péret est mort. On l’enterrait hier après-midi au cimetière Montparnasse. Le rideau de fer du café est resté tiré toute la journée de jeudi. Ca m’a fait de la peine. Je connais l’endroit depuis qu’il s’appelait Le Rallye. J’y suis allé et je continue de m’y rendre plus que souvent. Il avait laissé l’affaire à ses enfants. On se croisait quelquefois dans la rue Daguerre. Bonjour, bonsoir. Les prochains verres, là-bas, chez lui, je les boirai à sa mémoire.

Jeudi 28 octobre 2010. 23h50.

C’était l’anniversaire d’Amélie. Nous avons déjeuné à l’huîtrerie de la rue Montfaucon. J’avais vu une paire de gants brodés dans une boutique, rue de Seine. Tout petit cadeau. Comment lui dire, lui redire, et encore, qu’elle m’est unique, qu’elle m’est indispensable… Marion et Jérôme sont venus à la maison le soir. Jérôme bouleversé encore de la cérémonie d’hier à la chapelle d’Antibes. Nous les avons emmenés au couscous de la rue Sophie-Germain. Une adresse très simple. Le bouillon y est délicieux pour qui aime coriandre et cumin. Le patron n’y sert plus du tout d’alcool. Il tolère qu’on apporte son vin. Alors, au dessus de nos propres bouteilles, nous avons parlé longtemps de famille, d’histoires de famille, de secrets et d’avenir.

- page 86 de 137 -