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mardi 2 octobre 2012

Mercredi 26 septembre 2012. 19h45.

Ca couvait depuis quelques jours, mais là, ça y est. Je tousse, je mouche, j’ai mal à la gorge et la tête prise dans un douloureux étau. Impossible de lire. Et d’ailleurs de faire quoi que ce soit. Ma seule sortie aura été pour la pharmacie. Je me suis mis au lit dans des hauts-le-coeur d’aspirine effervescente, d’essence algérienne, de sirop et de pastilles douceâtres.

Mardi 25 septembre 2012. 20h00.

J’ai eu un message de Mercedes aujourd’hui. Trois lignes affectueuses pour prendre des nouvelles. On ne se voit plus. Nous nous sommes juste aperçus au salon du Livre au printemps. Je ne sais même plus quand elle et Estéban ont déménagé en Seine-et-Marne. Un an ? Deux ans ? Davantage ? Ils habitent à Villenoy, je crois. Une petite ville de l’agglomération de Meaux. Qu’est-ce qu’ils sont allés faire dans ce coin-là ? Je ne sais plus. Nous avons le même âge elle et moi à une dizaine de jours près. J’ai appris sa date de naissance en 2004 avec la quatrième de couverture de son recueil de nouvelles sur la guerre d’Espagne, La promenade des délices : Le premier octobre, alors, était le jour du caudillo, de Franco. Madrid était couverte de fleurs. Des bannières et des drapeaux flottaient aux balcons. Au début, son grand-père lui racontait que toutes ces fleurs et ces couleurs fêtaient son anniversaire, à elle, Mercedes… Il y a aussi une phrase de la nouvelle qui donne son titre au livre et que je connais presque par cœur. Deux ou trois femmes, une dizaine d’hommes, ligotés les mains dans le dos attendaient près du camion. Beaucoup pleuraient. Don Luis regardait autour de lui avec curiosité, peut-être à la recherche d’un dernier papillon. Tout ce qu’écrit Mercedes est bouleversant, et profondément vrai, et profondément juste. J’aimerais qu’on se revoie. Quelquefois je pense qu’il peut arriver vite, le dernier papillon.

Lundi 24 septembre 2012. 21h45

J’avais rendez-vous Aux tonneaux des Halles, rue Montorgueil, pour la réunion du prix du roman populiste-Eugène Dabit. J’étais passé prendre une dizaine d’exemplaires d’United colours of crime de Richard Morgiève chez Carnets nord, villa Cœur-de-Vey, à deux pas de l’appartement. L’incident avec la responsable éditoriale qui refusait de l’envoyer aux membres du jury est maintenant clos. Quelle histoire idiote. Je suis content d’être parvenu à arranger les choses. United colours of crime est un texte exceptionnel pour lequel j’aimerais vraiment faire partager mon enthousiasme. Première sélection de quatre, cinq titres pour le 22 octobre, puis désignation du lauréat. Nous avons parlé du choix lieu pour la remise du prix. Eugène Dabit oblige, j’ai proposé l’hôtel du Nord. Reste à savoir si les actuels propriétaires seront intéressés. Je suis remonté à pied jusqu’au Luxembourg. Fait du courrier au Rostand en attendant l’heure de la réunion à Censier pour la rentrée universitaire. Là-bas, à la place de la pelouse et des deux malheureux arbres, on a édifié un nouveau bâtiment (enfin, il est toujours en chantier), un mastodonte gris, monté sur des piliers. Discussion un peu découragée au sujet des salles, des horaires, des listes. Bah, ça peut difficilement être pire que l’année dernière. Toutes les tracasseries administratives ne m’ôteront pas le plaisir que j’ai à me retrouver avec les étudiants. Amélie m’attendait chez Pasta e fagioli. Penser à réserver pour la prochaine fois la table un peu en retrait près de la rue. Quale è il numero del tavolo ? - Uno C… C’est noté.

Dimanche 23 septembre 2012. 22h10.

Matinée de rangements. Jean-Pascal était à Carolles pour la journée. Nous avons déjeuné à Coquelonde avec Simone. Il m’a raccompagné à la maison. Il va prendre soin de mes petites plantations. Je ne serai de retour que vers le 10 octobre. Passé porter à Georgette un maigre bouquet des dernières fleurs du jardin : dahlias, asters, sedums spectabile. A bientôt... Amélie m’attendait à Montparnasse. Comme la semaine sans elle a été longue.

Dimanche 23 septembre 2012. 1h30.

Franck est venu réparer tout un tas minuscles bricoles. Le robinet de la cuisine, l’éclairage de l’entrée, une chasse d’eau, une prise de courant... Il a aussi rapporté le lustre que je lui avais donné à monter cet été. Une grande suspension 1930 en fer forgé qui vient de la rue d’Avelghem. Il n’a pas pu l’installer entièrement. Dans le transport, il avait égaré une petite pièce. J’arrangerai ça la semaine prochaine. Livraison de bois aussi. J’avais commandé une corde à M. Toupet, l’élagueur qui doit venir tailler les arbres cet hiver. Passé la journée à dégager les bûches amoncelées devant la maison, à les ranger sous l’auvent. Je suis allé chez Walter acheter le service à découper style Empire que nous avions repéré avec Amélie la semaine dernière. Un nécessaire à gigot avec deux couverts à salade, les manches en argent fourré. Ce sera le cadeau de mariage de Marion et Jérôme. Il était temps. Plus de deux ans à présent… Mais cela n’a pas été simple de trouver quelque chose qui leur plaise vraiment. Je vais restaurer un peu le coffret, faire briller l’argenterie, aiguiser le couteau. Je rentrais à la maison quand Norbert m’a appellé. Tu es toujours tout seul ? On t’invite à dîner. Il y avait chez lui quelques amis, des gens que je ne connaissais pas, sauf Philippe, le jardinier du chemin des pendants venu avec sa femme et ses deux enfants. Norbert avait cuisiné des « oursins granvillais », d’énormes paupiettes de veau d’un bon kilo emplies de fromage, de bacon, de farce fine. La spécialité de l’ancienne boucherie Morice, rue Paul-Poirier. Le magasin a fermé depuis quelques années, mais Norbert parvient toujours à s’en procurer.

dimanche 23 septembre 2012

Vendredi 21 septembre 2011. 23h20.

Georgette est fatiguée. Elle n’a plus le goût de grand chose. Cette semaine, je ne suis pas allé du tout au marché, faire ses courses. Mais je n’ai besoin de rien ! Elle s’ennuie. Je passe un quart d’heure avec elle. Le temps qu’il fait. Les fleurs. C’est moi qui n’ai pas grand chose à dire. Tu travailles ? J’ai fini tard mon papier. J’ai beau relire. Je ne sais pas si ça va. Si c’est bien…

Jeudi 20 septembre 2012. 21h45.

Thomas aussi m’a appelé d’Angleterre pour mon anniversaire. Ce singulier petit garçon qui aime les plantes, qui recherche le nom des bêtes. Je pense à lui souvent. Je n’aurai plus d’enfants. J’aimerais bien aller le voir à Londres, où il habite depuis cette rentrée dans ce West Kensington, pas très loin de Hyde park ou de Holland park. Je ne sais plus. Fin d’année ? Pourquoi pas… J’ai passé une partie de la journée en correspondances avec les membres du jury du Prix du roman populiste – Eugène Dabit. Dès la première réunion, j’avais proposé pour la sélection United colours of crime de Richard Morgiève, publié en janvier chez Carnets nord. Pour obtenir des exemplaires du livre, Philippe avait adressé plusieurs courriers à l’éditeur, tous semble-t-il, restés sans réponse. Il a fini par recevoir hier un refus, juste ce qu’il faut de pète sec, de la responsable éditoriale : En l’état actuel du marché, très difficile pour tous les éditeurs et notamment les petits, comme vous devez le savoir puisque vous aimez la littérature, nous ne sommes pas en mesure d’effectuer des envois de livres gratuits dès qu’un prix nous sollicite — car ils sont nombreux. Cela finit par constituer un coût, entre les envois gratuits aux libraires que nous servons toujours car ils sont un maillon essentiel de la chaîne, à la presse, aux bloggeurs, aux festivals divers et variés, et… aux prix. Si vous souhaitez soutenir Richard Morgiève, et vous auriez raison car il est très talentueux, le livre est encore en librairie. J’ai répondu à la dame. C’est simplement méprisant. Pour bien connaître, de l'intérieur, des maisons d'éditions vraiment sans le sou, sans salariés (je pense notamment à Caractères où je travaille gratis pro Deo), je ne peux pas croire un instant que l'on aurait pas pu « s'arranger » d'une manière ou d'une autre si vraiment le souci était strictement d'ordre financier. La prochaine réunion du jury a lieu lundi. Je ne lâcherai pas l’affaire. Relu Marie-Hélène Lafon pour son portrait que je dois faire pour Le Monde. J’ai remâché cette phrase d’Album où elle parle du Cantal : J’en suis. De là-haut. J’en descends. Comme d’une lignée profonde. Lignée de vie, ligne de sens…

jeudi 20 septembre 2012

Mercredi 19 septembre 2012. 22h10.

Voilà. C’est comme si j’avais entendu ce petit clac de l’horloge quand l’aiguille arrive à l’heure, et qui précède d’un instant la sonnerie. Je les ai mes cinquante-sept ans. J’ai reçu tout un tas de messages gentils. Du courrier dans la boîte aux lettres aussi. Une carte de Martine et d’Agathe, une de Jean-Pascal. Et un mot d’Amélie. Je suis allé chez Georgette avec une bouteille de muscadet frais. Ah bon, c’est aujourd’hui ? Je n’ai pas réussi à me mettre au travail. J'ai été jusqu’aux Fontenelles. Descendu à la plage. Traîné. La journée a glissé. J’allais me mettre au lit quand les petites ont appelé du Mexique. Bon anniversaire Xavier ! J’ai pensé à Peter Pan de James Matthew Barrie You just think lovely wonderful thoughts and they lift you up in the air. Je les tiens pour la nuit cette fois mes pensées douces. Je suis allé me coucher confiant.

Mardi 18 septembre 2012. 23h00.

Je devais déjeuner aujourd’hui avec Joëlle, à Paris. Complètement oublié de la prévenir que j’étais à Carolles cette semaine. Quand elle a appellé en fin de matinée pour notre rendez-vous, je me suis senti honteux comme jamais. Mais ce n’est pas grave ! Je m’en veux. Je laisse tout aller. J’ai fait le détour par la falaise en rentrant de chez Georgette. Comme j’avais coupé à travers champs, je me suis trouvé dans des sentiers que je ne connaissais pas ou plutôt que je ne reconnaissais plus. Tout avait été nettoyé, dégagé, là où j’avais le souvenir qu’il fallait se faufiler entre les broussailles et les épines. Des poutrelles de bois avaient même été installées en marches dans les endroits pentus. Pendant un moment qui m’a paru fort long, je me suis laissé prendre dans le sentiment angoissant de l’inquiétante étrangeté. J’ai éprouvé un vrai soulagement lorsque j’ai aperçu la mer et que le chemin m’est redevenu familier. C’était grande marée. Un coefficient de plus de 100. Il y avait une bonne dizaine de pêcheurs de crevette qui poussaient leur bichette. Les nôtres sont dans la cabine à la plage. Nous ne nous en sommes pas servi depuis bien longtemps. J’ai écrit mon papier pour Le Monde sur Personnages secondaires de l’écrivain chilien Alejandro Zambra. Un roman qui déroule une réflexion intime sur les dernières années de la dictature de Pinochet. Et qui parle de ces générations d’entre-deux. Celles qui n’ont pas eu à prendre parti. Qui n’ont sans doute rien fait qu’attendre. Et regardent maintenant le monde en enfants vieillis. J’allais être un souvenir, devenu grand, écrit Zambra. Premier vers d’un poème qu’il n’achève pas.

mardi 18 septembre 2012

Lundi 17 septembre 2012. 23h45.

J'ai envoyé à Raphaëlle mon court papier sur Le coursier de Valenciennes, premier roman de Clélia Anfray chez Gallimard. Ecrit ma chronique pour Next. Fait de la compote à la cannelle avec les pommes tombées au jardin. Jean-Pascal m'a appelé. Il a commandé pour moi des centaines de bulbes de chionodoxa sardensis et de cyclamen hederifolium. Ce sera mon cadeau d'anniversaire. Dans deux jours j'ai cinquante-sept ans.

Dimanche 16 septembre 2012. 22h00

Amélie voulait aller au potager. Je n’y avais pas mis les pieds de la semaine. Nous avons commencé consciencieusement à désherber les carrés de poireaux, juqu’au moment où nous nous sommes aperçus que les plants n’avaient vraiment pas l’air en forme. Les fûts étaient creusés de galeries fines et commençaient à s’effondrer. Il doit s’agir de ce qu’on appelle la mouche mineuse. Les larves rongent tout l’intérieur. J’ai arraché ceux qui étaient encore sains. Une cinquantaine, à peine plus gros qu’un doigt. Maigre récolte. Nous avons continué à travailler au soleil tiède de l’après-midi. Dégagé les salades, posé des tuiles sous les potimarrons. L’angélus a sonné au clocher de Carolles. Qu’est-ce que c’était bien ! Moi, je sentais au cœur le pincement du dimanche terminé.

Dimanche 16 septembre 2012. 16h00.

Grand soleil, la mer ondulant en vagues calmes. Amélie a fait son « longe-côte » jusqu’à Jullouville et retour. C’est à chaque fois une étrange promenade que nous faisons ainsi à deux. Elle dans l’eau, moi sur le sable, avançant malgré tout au même rythme. Eloignés d’une dizaine de mètres, mais plus proches que si nous nous tenions par la main. Dépéchons-nous, Georgette t’attend. Elle ne me parle que de toi. Elle demande sans cesse de tes nouvelles. Là-bas, nous avons bu un verre de chinon rosé, grignoté quelques biscuits. Déjeuner au jardin.

Samedi 15 septembre 2012. 23h40.

La saison est bien terminée. J’ai eu beau partir un peu tard, il n’y avait pas foule au marché de Granville. J’ai fait les courses pour notre court week-end. Amélie n’arrivait que le soir. Elle devait accompagner Lucile Bordes à France Inter pour son premier roman Je suis la marquise de Carabas. Je suis rentré chargé. Des langoustines, des praires, des saint-pierre, des encornets. Du jambon à l’os, des rillettes. Des kilos de petites tomates. Des reine-claude, des fraises, des pêches de jardin. Du pain d’épeautre, de la crème fraîche. Un gros bouquet de tournesols. Passé chez Georgette en coup de vent pour lui déposer ses affaires. Tu me fais bien mon compte. J’ai additionné les tickets, enfin ceux que j’avais. Et Amélie vient quand ? J’ai dépéché la journée en une myriade de choses à mettre en ordre. Le ménage, la cuisine pour le dîner, les feuilles à ramasser au jardin. J’ai donné un dernier coup de râteau avant de partir à la gare. Vingt minutes. J’étais pile à l’heure pour le train.

vendredi 14 septembre 2012

Vendredi 14 septembre 2012. 20h40.

Temps gris et froid. Venteux, cafardeux. J’ai tiré des bords dans la journée. Echangé des messages avec Florence et Raphaëlle pour le rendu de mes papiers. Je vais avoir une semaine prochaine bien occupée. Tant mieux. Passé voir Georgette pour sa liste de courses au marché de Granville. Elle peste. Sa TV ne fonctionne plus. Un problème d’antenne. Alors, j’ai fini tous les livres que vous m’avez laissés la dernière fois. Il faut m’en rapporter d’autres. J’ai appelé Jean-Pascal à Epron. Martine se faisait opérer aujourd’hui. Elle n’est restée à l’hôpital que la journée. Elle est épuisée mais tout va bien.

Jeudi 13 septembre 2012. 23h00.

J’ai pris le premier train pour Granville. Levé tôt. Mais c’est sans importance. Je dors mal en ce moment ou plutôt, je me réveille en sursaut sur le coup des cinq heures du matin, secoué par les angoisses. Je n’avais pas envie de partir. Pas envie de quitter Amélie. Je vais à Carolles une longue semaine pour essayer de travailler. Les papiers pour Le Monde, les rencontres que je dois animer bientôt à Guéret et à Gradignan et puis me remettre à ce livre qui me fait comme une ligne d’horizon. Inatteignable, à jamais. Je n’ai pas eu de nouvelles de Jean-Marc à qui j’ai écrit mes difficultés il y a quelques semaines. Il a d’autres soucis en ce moment. Fait trois courses en arrivant au marché de Saint-Pair. Acheté à tout hasard une sole pour Georgette. Tu as bien fait. Elle revient juste d’une petite balade dans le bourg. Contente. J’ai rencontré plein de monde : les Sévin, Mme Corbesier, Mme Fraboulet... Il fait un temps magnifique ici. Plein été d’arrière-saison. A la maison, le jardin est jonché des premières feuilles mortes. L’élagueur d’EDF est passé dégager le cable électrique empêtré dans les branches du grand sapin. Coupez le moins possible s’il vous plaît. J’ai vidé ma valise. Essayé de mettre un peu d’ordre dans les affaires. Tous les livres que j’ai apportés. Et puis le courrier, les factures à payer. Norbert a téléphoné. Il veut m’inviter à dîner. Tu es tout seul, non ? J’ai traîné l’après-midi de bricole en bricole : ramasser les pommes tombées, couper les phlox fanés, installer les fossiles sur les nouvelles étagères que le menuisier a posées dans le couloir… Je suis parti chez Annick et Norbert au soleil rasant. Soirée calme. Comme ils sont gentils ces deux-là…

jeudi 13 septembre 2012

Mercredi 12 septembre 2012. 22h50.

J’essaye de trouver un peu de sens dans le gribouillis des notes de ma rencontre de la semaine dernière avec Marie-Hélène Lafon. Je ne parviens qu’à grande peine à déchiffrer ce que j’ai écrit. Du coup, je ne me plains pas du manque de nouvelles du Monde pour les commandes des papiers. D’une certaine manière, en ce moment, je préfère. Je fais le dos rond. Mais combien de temps cela va-t-il pouvoir durer ? J’ai nettoyé l’aquarium de Gustave, notre carassin doré. Rincé les graviers, changé le filtre de la pompe, placé une nouvelle plante… Bientôt deux ans que sa compagnie frétillante résiste vaillamment à nos oublis, à nos absences. J’ai relu Que viva la musica d’Andrés Caicedo avant d’aller à la rencontre organisée autour du livre à la Maison de l’Amérique latine. Il y avait là Bernard Cohen, le traducteur et Anouck Linck, une jeune universitaire de Caen spécialiste de Caicedo. Que viva la musica est le roman époustouflant d’un auteur colombien suicidé à vingt-cinq ans en 1977. Une histoire de vie brûlée, dévorée, dans les excès et la férocité triste. C’est un texte qui attrape, qui bouscule, qui tord, qui se tord dans le rythme des salsas. Un texte aussi qui s’agite et qui laisse exténué de temps court et saccadé. J’avais prévu de proposer à Florence pour Le Monde de l’aborder dans une « Traversée » en y ajoutant Le bruit des choses qui tombent de Juan Gabriel Vasquez et 35 morts de Sergio Alvarez. Mais l’idée, en rassemblant ces trois livres, de remonter les années de drogue et de violence en Colombie ne tient pas vraiment et, surtout, Que viva la musica est tellement un texte à part (entière) qu’il faut lui laisser toute la place. Anouck Link expliquait que, dans la jeunesse volontairement arrêtée d’Andrés Caicedo, elle avait ressenti comme l’expression d’une nostalgie presque effrayante de l’adolescence. Nous avons bavardé un moment ensemble après la présentation. Evoqué ces « enfants vieillis » dont parle Lewis Carroll. Amélie était venue me rejoindre. Embrassé Diane. Il est tard. On rentre à la maison ?

mercredi 12 septembre 2012

Mardi 11 septembre 2012. 23h40.

J’ai parlé un moment à Laurence au téléphone. On ne s’était pas donné de nouvelles depuis juin. Elle a passé un été un peu mouvementé. Des voyages lointains. Des choix compliqués aussi. Je suis apaisée maintenant, dit-elle. Elle s’est engouffrée dans la rentrée avec une confiance et un enthousiasme que je lui envie. Elle n’a que des projets et des jours occupés. Et toi ? Oh, j’aimerais tant avoir des choses à répondre. J’ai l’impression d’enrouler les heures inutilement en pelote serrée. J’ai envoyé les quelques photos retrouvées de l’oncle Albert à Françoise. Pas su bien quoi écrire dans le petit mot d’accompagnement. Affectueusement… C’est ce qui sonne le plus juste ici dans ces relations de famille sans souvenirs en commun. J’ai reçu un message d’Annabelle. Elle entre à l’EFAP à Lille en octobre. C’est vrai qu’elle va avoir vingt ans au début de l’an prochain… Elle est déçue qu’on ne s’écrive plus. Je voulais te le dire. Ca me tenait à coeur depuis longtemps. J’ai cessé la correspondance avec elle il y a un moment. Je m’en suis retenu en fait. Parce que j'avais peur de l'embêter. Je me disais que sa jeune vie devait tellement l'occuper qu'il ne restait guère de place pour les petits morceaux de nostalgie et les nouvelles sans importance. Du coup elle s’est sentie un peu abandonnée. Comme j’ai été bête. Amélie est passée me chercher. Nous avions rendez-vous pour dîner avec Marianne à la Réparate, le restaurant niçois de la rue Saint-Sabin. L’occasion de lui donner l’érable du Japon que Jean-Pascal avait choisi pour elle. Tu n’oublieras pas de lui dire qu’il s’agit d’une variété « seedling », obtenue à partir d’une graine. Bon : acer palmatum seedling. J’ai répété la leçon.

mardi 11 septembre 2012

Lundi 10 septembre 2012. 21h50.

J’ai du mal à m’y remettre. A m’y mettre tout court. Je dois finir le décryptage de mes entretiens. Commencer à rédiger les papiers. Je me sens fatigué.

Dimanche 9 septembre 2012. 23h45.

Nous avons laissé les valises à la bagagerie de l’hôtel pour notre dernière journée. Longue visite de l’exposition « Trésors de la collection Brukenthal », à la Villa Vauban, le musée d’Art de la Ville de Luxembourg. Je n'avais jamais entendu parler de Samuel von Brukenthal. Cet aristocrate des Lumières, de la cour de Marie-Thérèse d’Autriche, avait rassemblé, à partir de la moitié du XVIIIe siècle, peintures, sculptures, estampes, livres, monnaies, médailles et une foule de curiosités précieuses. L’ensemble est habituellement conservé dans son palais, à Sibiu, en Transylvanie, où l’impératrice l’avait nommé gouverneur. Ici, c’était surtout les tableaux. Des splendeurs. Un Ecce Homo de Titien, un portrait de jeune garçon de Véronèse, et des van Eyck, des Memling, des Frans Boels, des Jacob Jordaens, des Hans Wertinger… Il y avait aussi une Vierge Marie de Cranach l’Ancien et une des plus belles versions du Massacre des Innocents de Brueghel. L’autre aile du musée était réservée à un choix des collections permanentes. Le plus étonnant est que les salles étaient vides. Ou presque. Cinq, six personnes. Au plus. Ce qui m’a séduit pour une grande part dans ces trois jours restera cette absence de foule et de bruit. Partout. Rien ne gâche l’harmonie. Comme nous rentrions de déjeuner, j’ai trouvé, abandonnée contre une gouttière, au coin d’une rue, une petite toile sale et abîmée. Une croûte d’amateur sans vrai âge, pleine de charme naïf. Elle représente un paysage de polder. Les Moëres peut-être. Barque plate, maisons basses aux tuiles flamandes, passerelle à bascule, meule de foin à toit carré. Je l’ai prise sous le bras. Ce sera notre souvenir de ce voyage. Retour à Paris. Nous avons dîné chez Marion et Jérôme. Gabrielle a bien grandi…

lundi 10 septembre 2012

Samedi 8 septembre 2012. 20h50.

En chemin vers la basse-ville, nous avons suivi les élégants invités d’une noce vraiment chic. Il en venait de partout. A pied et en voiture. Jaquettes gris perle, hauts-de-forme, jolies robes, tailleurs et grands chapeaux. Avec quelques autres curieux nous nous sommes mis un peu en retrait sur la placette du parvis de Saint-Jean-du-Gründ, pour attendre la mariée et la voir entrer dans l’église aux accents de la fanfare royale grand ducale, toute en dentelles, tenant le bras de son père... Visite du musée d’histoire naturelle et de ses collections d’animaux naturalisés. Déjeuner au frais de la tonnelle d’un petit restaurant. L’après-midi, nous avons marché au hasard des rues, nous égarant d’escaliers en terrasses dans les vergers abandonnés. Poires et coings et pommes. Nous en avons chapardées deux, rouges foncées, à la chair blanche et juteuse.

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