J’essaye de trouver un peu de sens dans le gribouillis des notes de ma rencontre de la semaine dernière avec Marie-Hélène Lafon. Je ne parviens qu’à grande peine à déchiffrer ce que j’ai écrit. Du coup, je ne me plains pas du manque de nouvelles du Monde pour les commandes des papiers. D’une certaine manière, en ce moment, je préfère. Je fais le dos rond. Mais combien de temps cela va-t-il pouvoir durer ? J’ai nettoyé l’aquarium de Gustave, notre carassin doré. Rincé les graviers, changé le filtre de la pompe, placé une nouvelle plante… Bientôt deux ans que sa compagnie frétillante résiste vaillamment à nos oublis, à nos absences. J’ai relu Que viva la musica d’Andrés Caicedo avant d’aller à la rencontre organisée autour du livre à la Maison de l’Amérique latine. Il y avait là Bernard Cohen, le traducteur et Anouck Linck, une jeune universitaire de Caen spécialiste de Caicedo. Que viva la musica est le roman époustouflant d’un auteur colombien suicidé à vingt-cinq ans en 1977. Une histoire de vie brûlée, dévorée, dans les excès et la férocité triste. C’est un texte qui attrape, qui bouscule, qui tord, qui se tord dans le rythme des salsas. Un texte aussi qui s’agite et qui laisse exténué de temps court et saccadé. J’avais prévu de proposer à Florence pour Le Monde de l’aborder dans une « Traversée » en y ajoutant Le bruit des choses qui tombent de Juan Gabriel Vasquez et 35 morts de Sergio Alvarez. Mais l’idée, en rassemblant ces trois livres, de remonter les années de drogue et de violence en Colombie ne tient pas vraiment et, surtout, Que viva la musica est tellement un texte à part (entière) qu’il faut lui laisser toute la place. Anouck Link expliquait que, dans la jeunesse volontairement arrêtée d’Andrés Caicedo, elle avait ressenti comme l’expression d’une nostalgie presque effrayante de l’adolescence. Nous avons bavardé un moment ensemble après la présentation. Evoqué ces « enfants vieillis » dont parle Lewis Carroll. Amélie était venue me rejoindre. Embrassé Diane. Il est tard. On rentre à la maison ?