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lundi 7 juillet 2008

Samedi 5 juillet. 22h50

En même pas deux semaines l’herbe aux Fontenelles avait incroyablement repoussé. Nous nous sommes décidés. Ce matin, nous avons acheté une tondeuse à moteur. L’après midi s’est passé là-bas. Pendant que je quadrillais le terrain avec l’engin, Amélie cueillait les baies de cassis. A la maison, nous avons fastidieusement égrené toute la récolte : deux kilos ! Demain nous en ferons des confitures.

Vendredi 4 juillet. 23h40

C’était mon dernier Jeux d’Epreuves avant la rentrée. J’avais amené Le Tutu de Princesse Sapho qui vient d’être réimprimé. Cet écrit anonyme fin XIXe découvert par Pascal Pia dans les années soixante et publié pour la première fois (en dehors des rares exemplaires de l’édition originale) chez Tristram en 1991 est un véritable feu d’artifice de nonsense et de délirante étrangeté. Ca m’a permis un joli bouquet final. J’étais venu dans le studio avec ma valise. Il semble que, désormais, elle ne me quitte plus quand je suis à Paris... Josyane m’a ramené en voiture jusqu’à la gare Montparnasse. Nous avons parlé du Monde, de la rentrée aussi. Point de côté, le livre où elle a rassemblé ses souvenirs sort en octobre. La narration commence en 2005 quand on l’a obligée à quitter la direction du supplément. Je me souviens de ce moment. Je venais de perdre mon travail à Point de Vue. J’avais envoyé des lettres, aux uns, aux autres. Passé des coups de fil. Pas la moindre réponse. J’étais assez désespéré. Josyane m’avait invité à déjeuner alors même qu’elle était en plein marasme. Elle m’avait présenté Christine. Quelques mois plus tard, mon premier papier sortait. Je sais ce que je lui dois. C’est tout.

J’ai eu du mal à trouver des places dans le train. C’était les départs en vacances. Amélie est arrivée à peine deux minutes avant le coup de sifflet. Ouf ! J’ai bien cru que j’allais faire le voyage tout seul.

vendredi 4 juillet 2008

Jeudi 3 juillet. 23h00

Je suis arrivé à Paris par le premier train. Pas le temps de passer à l’appartement poser la valise, je suis allé directement chez Buchet où m’attendait la suite de la chronologie de Marguerite Audoux. Je n’en vois pas le bout. Toujours de dates à reprendre. Des événements à éclaircir. En fourrageant dans la biographie que lui a consacré Bernard-Marie Garreau, j’ai découvert qu’elle avait séjourné à Saint-Pair-sur-Mer. Je vais lui demander s’il a des précisions sur cette villégiature. A-t-elle écrit là-bas ? Y a-t-il des lettres ? J’irai bien voir la maison où elle logeait. Drôle de penser qu’elle a partagé la même grève, qu’elle regardait les îles, qu’elle a dû guetter au soir les phares ou attendre, dans la fin du couchant, l’improbable moment du rayon vert. J’aime ce clin d’œil alors que l’édition du livre se termine. Enfin, se termine presque... J’ai envoyé mes choix de rentrée pour Le Monde à Christine. A Florence aussi pour la littérature étrangère. Jeanne Benameur, Véronique Bergen, Cécile Wajsbrot, Emmanuelle Pagano, Céline Minard, Fabienne Swiatly… Et puis Julia Leigh aussi. Cette jeune femme australienne publie Ailleurs, son deuxième roman, aux éditions Bourgois. Le premier, Le Chasseur, paru début 2001 chez Actes Sud, m’avait incroyablement envahi. Je l’avais rencontrée à Paris à l’ambassade d’Australie lors d’une réception pour le livre. Tout là-bas m'était encore présent. Adélaïde, Melbourne, Sydney. Nous avions bavardé un moment. Echangé nos adresses, mais nous ne nous sommes jamais écrit. Aujourd'hui, j’ai très hâte de lire.

mercredi 2 juillet 2008

Mercredi 2 juillet. 20h10

Il a plu presque toute la journée. De quoi remplir les tonneaux, ici et aux Fontenelles. Je suis passé au potager. J'ai profité pour y aller d'une éclaircie chaude, un de ces moments où la terre sent si bon qu'on s'arrête en chemin pour respirer lentement. Le foin, l'humus sucré, les fleurs humides. Là-bas, il faudrait nettoyer un peu les planches. Je n'ai pas le temps. Au fond, les cassis ploient sous les fruits. Ils ne sont pas encore tout à fait mûrs. Nous les cueillerons samedi. J'ai mangé une dizaine de framboises tièdes. Des Loganberries plutôt. Une grosse bouffée d'enfance. Comme tout se mélange, se retient, se rejoint. Les jardins et ce livre qui si lentement avance.

mardi 1 juillet 2008

Mardi 1er juillet. 23h10

J'ai envoyé les papiers à la préfecture pour changer la carte grise de la voiture. Deux ans que je devais le faire, mais je ne me résolvais pas à ce qu'elle soit à mon nom. Je ne sais pas ce qui m'a poussé. Peut-être un sursaut de réalisme. La validité du contrôle technique, et tout ça. J'ai retrouvé le certificat d'hérédité : Laisse pour recueillir sa succession son fils unique, Monsieur Xavier, Marie, Jacques, Angelo, Houssin, journaliste... J'ai mis sous enveloppe ce qu'ils m'avaient demandé. Posté le tout à la préfecture de Saint-Lô. C'est fait.

Lundi 30 juin. 22h00

Le premier train. Les courses. J'étais à Carolles vers midi. Jean-Claude est venu me rejoindre comme prévu à 13h. J'attendais en effet le passage du transporteur qui amenait les portes de serre depuis Grasse. Elles forment un double battant en fer, début XXe, encadrant deux tiers de verre épais. Elles rouillaient dans un coin chez François, l'oncle d'Amélie, qui nous les a gentiment données. Le chauffeur du camion ne voulait pas s'engager dans le chemin. Avec son transpalette, nous avons tiré, poussé la longue caisse, en cahotant dans les cailloux jusqu'à la maison. Ca devait bien faire dans les deux cents kilos. Sacrée caisse. Emmanuel à dû passer beaucoup de temps à la construire mais le résultat est là : serrés dans ce gros puzzle de bois, les vantaux sont arrivés intacts.

lundi 30 juin 2008

Dimanche 29 juin. 20h30

Courte nuit à la maison d'hôtes où nous étions logés. Nous sommes partis de bonne heure pour pouvoir visiter, avant le retour à Paris, la maison de Pierre Loti à Rochefort. Depuis Le roman d’un enfant que j’ai lu vers treize ans, je nourris pour lui une immense affection, confortée à chaque livre, à chaque relecture. Toujours ce sentiment que j’ai de mailler les vies et les affinités littéraires. Il y a tant qui me lie. La mère et l’outremer… Il m’était, en plus, revenu récemment avec Escales en Méditerranée, que j’avais publié dans « Domaine Public ». Henri de Régnier y raconte en effet leur rencontre à Constantinople et les quelques jours passés ensemble. Pierre Loti et et ses yeux magnifiques, nostalgiquement désespérés, des yeux qui ont l’air de supplier la vie de ne pas passer si vite. J’avais très hâte de voir la maison. Mais quelle immense déconvenue. Quelle atroce déception. L’entrée du musée se fait en annexe dans un bâtiment rénové qui ressemble à un hall de clinique. Là derrière son guichet, un employé envahissant comme un vendeur d'aspirateurs vous fait décliner votre code postal, vous demande les raisons de votre visite et vous fourgue des bons de réduction pour les autres musées et les attractions culturelles de la région. Le pire est à venir. Pas moyen d’entrer seul. Toutes les visites sont guidées. Et sous la houlette d’un escogriffe mal attifé qui ânonne un texte consternant. Vous voici dans la maison de Julien Viaud. Oh, n’ayez pas peur, vous ne vous êtes pas trompés. Ah, ah, ah, Pierre Loti était son nom de plume… Et de répéter toutes les deux phrases comme si nous étions à Eurodisney : Nous allons bientôt commencer notre merveilleux voyage ! Amélie et Marianne ont fait quelques pas vers la pièce à côté. Non Mesdames, revenez. Pour des raisons de sécurité, il est important de rester groupés. Nous nous sommes enfuis, prétextant le train à prendre. Rien à faire pour négocier juste une simple traversée, rapide, de la maison. J’en aurais pleuré de rage. Me revenait cette phrase du Journal : C'est ici qu'est mon logis fixe, mon vrai logis, celui où je suis né, celui où de temps en temps, je reviens me poser… A la Rochelle, avant de rejoindre la gare, nous nous sommes arrêtés à la terrasse d’un bistrot sur le vieux port. Histoire de se venger un peu, nous avons commandé des huîtres avec du muscadet.

dimanche 29 juin 2008

Dimanche 29 juin. 3h15

Nous rentrons juste de la fête du mariage de Catou et Jocelyn. Cela se passait près de Royan dans une de ces belles propriétés construites au XVIIIe par les négociants en cognac. La tente blanche de la réception était dressée à l’entrée du parc, juste après un cèdre immense qui devait avoir au moins trois cents ans. Un peu plus loin un chêne vert, un if... Au loin, à la lisière de la prairie, tout un rideau de frênes. Marianne avait fait le trajet avec Amélie et moi depuis Paris. Toutes deux travaillaient avec Catou du temps de Droit d’auteurs, il y a maintenant une dizaine d’années. Amélie a, en amitié, une constance douce. Moi, je n’avais vu Catou et Jocelyn qu’une fois, à un dîner chez eux, dans leur petite maison de Romainville. Ils ont décidé de passer devant le maire après trois enfants et dix-neuf années de vie commune. Cela donnait à ces réjouissances une résonance particulière, une note d’infinie tendresse et d’émotion discrète, enveloppante. De la famille, des amis proches, avec chacun un lien particulier, des gens de son émission de TV. Des enfants petits aussi. Un heureux mélange des genres. Nous étions installés à la table des mariés. Tout était très vrai, très simple, très gai. Quand nous sommes partis, Catou en nous embrassant nous a demandé : Et vous, c’est quand ?

Vendredi 27 juin. 23h45

Cela faisait plus d’une semaine qu’Amélie avait réservé les places. Nous allions voir Figaro divorce d’Horváth au Théâtre français. Arrivés dans la loge quelques minutes avant le lever de rideau, nous y avons retrouvé par hasard Jean-Michel Ulmann d’Impact médecin. Cela faisait longtemps qu’on ne s’était pas croisés. Je ne sais pas pourquoi mais cela m’a semblé de bon augure. J’ai serré doucement le bras d’Amélie. J’ai vécu, enfant, dans cette salle ma toute première émotion théâtrale. C’était Cyrano de Rostand avec Jean Piat. Je devais avoir huit ou neuf ans. Cela m’avait transporté. J’avais appris par cœur les tirades, les scènes. Je les sais encore. Quand je laisse ici aller mon regard sur les velours, sur les dorures, il me revient toujours quelque chose de ce frisson-là. Mais nous ne sommes pas restés. A l’entracte, nous avons juste échangé un regard. Vous en pensez quoi ?, nous a demandé Jean-Michel avec une moue dubitative. Lui aussi était déçu. Nous avons filé. La mise en scène recouvrait le texte de quelque chose de lourd, de trop parfait, de trop léché. Tant pis pour la suite… Nous avons marché un peu, libérés et légers. Fini par pousser la porte de l’un des nombreux restaurants japonais de la rue Sainte-Anne où nous avons poursuivi notre petit moment d’étrangeté complice. Drôle de soirée. En rentrant, comme c’était tout près, nous avons fait un crochet par la rue Thérèse. Là où la Harpe habitait à son retour d’exil et là où il est mort. Je pensais à sa Réponse aux observations pour les comédiens français qu’il avait écrite vers 1795 avec Mercier, Champfort, Sedaime et… Beaumarchais : Nous soutenons et nous avons prouvé que ces pièces étaient devenues votre proie et ne sont pas votre propriété…

vendredi 27 juin 2008

Jeudi 26 juin. 23h30

Nous sommes allés prendre un verre chez Nathacha et Bernard. Ils habitent cette enclave étrange du VIIe arrondissement entre la rue de Babylone et la rue de Sèvres qu'on dirait, à n'importe quelle heure, vidée de ses habitants comme dans un mois d'août permanent. Ils occupent un appartement discret au premier étage, dans le fond d'une cour à la végétation grasse. C'était la première fois que nous allions chez eux. On s'est quitté après quelques coupes et un peu de bavardage tranquille. Nathacha était fatiguée. Leur bébé doit naître dans trois mois. Moi, je devais relire les livres pour l'enregistrement de Jeux d'Epreuves le lendemain. Il était presque un peu tard. Amélie m'a emmené dîner à deux pas chez Guiseppe, rue Pierre Leroux. Nous n'étions pas attablés depuis cinq minutes qu'ils entraient à leur tour dans le restaurant. Eux aussi y ont leurs habitudes. Du coup nous avons passé ensemble une assez jolie soirée. Ca me convenait bien, ce moment en deux temps. Bernard travaille pour RFO. Nous avons parlé des îles, des départements et des territoires d'outremer. De la Nouvelle-Calédonie... J'ai évoqué pour la première fois depuis très longtemps le parcours de mon père qui avait rejoint la France libre depuis Noumea. Je sais que j'ai quelque chose à faire avec cette histoire et sa suite. Bernard est visiblement très documenté autour de ces événements. Il a là-bas des contacts qui pourraient m'être utiles. Il m'a proposé de m'aider. Cette continuité des rencontres et des coïncidences me trouble et me ravit. Quelques portes s'ouvrent, au loin, c'est le cas de le dire...

mercredi 25 juin 2008

Mercredi 25 juin. 23h00

Cessé de travailler vers 16h00. Sans commentaire... J'ai essayé de classer les livres dans la bibliothèque mais j'ai vite filé au jardin. Semé sans grand espoir les graines de potirons (Giant pumpkin) d'un vieux paquet retrouvé par hasard. Le survivant de tout un lot acheté avec Victor-Antoine dans un petit supermarché à quelques kilomètres de son monastère de l'Etat de New York. Etrange moine, Américain d'origine béarnaise, rédacteur de livres de cuisine. On s'était rencontrés autour de recettes de soupes et de la dévotion à la Vierge de la Chapelle de la médaille miraculeuse. Je l'ai publié chez Buchet. Cela fait longtemps qu'on ne s'est pas donné de nouvelles. Si les potirons géants pointent leur nez, je l'appelle. Promis. Demain, je rentre à Paris.

mardi 24 juin 2008

Mardi 24 juin. 20h30

Journée grise, intérieure, enfermée dans une laborieuse écriture. Il faisait beau pourtant. Je me suis échappé vers les onze heures pour aller voir le terrain des Fontenelles. M. Mitaillé a fauché toute l'herbe. Dégagé les allées. Cela paraît immense à présent.

Lundi 23 juin. 22h20

Albert Cossery est mort hier dans sa chambre de l'hôtel Louisiane. Il avait 94 ans. Je n'ai appris la nouvelle que ce matin. Je l'avais rencontré à la fin de l'année 2005 pour un long papier dans Le Monde. J'étais impressionné. J'avais lu très tôt Mendiants et orgueilleux. Sur les pages de garde de mes cahiers, de mes livres scolaires, j'avais noté cette phrase de Gohar, son drôle de héros déchu : Je refuse tout simplement de collaborer à cette immense duperie. C'est ce qu'il avait fait, lui. Avec une étonnante constance du retrait. La vie est belle, m'avait-il dit dans ce souffle fibreux qui était devenu sa voix après son opération du larynx. J'ai téléphoné à Christine. Je pensais qu'on allait me confier la nécro, mais on l'avait déjà donnée à Marion Van Renterghem. Elle lui avait consacré plusieurs papiers à la fin des années 1990, dont un vraiment très beau qui s'appelait justement, je crois, Le mendiant orgueilleux. J'aurais bien aimé m'en occuper mais je ne vais pas me plaindre : cela n'interrompt pas mon travail. Enfin, ce que je parviens péniblement à faire. J'avance à tâtons dans le livre. Je bute sur le moindre mot. Je retricote sans cesse. Je bloque. Je bloque encore. Alors je vais faire un tour, je reviens avec mauvaise conscience. Et puis je continue. Ca ira mieux demain?

lundi 23 juin 2008

Dimanche 22 juin. 21h30

Jérôme m'a téléphoné assez tard hier soir. Son amie vient de le quitter. Il est triste et angoissé. Il a le sentiment que le temps s'est vidé. Il se perd, s'interroge. Je voudrais savoir la vérité, répète-t-il sans cesse. Comment lui expliquer qu'il n'y en a jamais. La faute à qui? Pourquoi? Il n'y a plus rien à dire quand tout est terminé. Il va reprendre souffle. Je vais lui retrouver ce poème de Plisnier : Ainsi/ il suffisait de rentrer dans toi-même...

Amélie a raté son train pour Paris. Entre les voitures des premiers estivants et la déviation infernale qu'il faut suivre en ce moment pour rejoindre la gare, nous sommes arrivés juste pour le voir partir. On s'est trouvé un peu déconcertés. Il faudra se lever vers quatre heures et demie. Mais, en silence, je n'étais pas mécontent.

Samedi 21 juin. 23h30

Il est déjà trop loin en saison pour trouver un cotoneaster lactea. Il faudra attendre l'automne. J'aurais bien voulu en planter un dès maintenant. Celui qui entoure la porte commence à donner des signes de vieillesse. Une partie de ses feuilles jaunit. Des branches se dessèchent. Je le surveille. Je le taille. J'ai peur de le voir emporté d'un coup par le feu bactérien. Au marché de Granville, nous avons acheté quelques plants de romaine et de chicorée frisée. Je les ai installés l'après-midi même aux Fontenelles. Nous nous sommes fourbus des heures de défrichage et de plantations. Georgette, à tout petits pas, est venue nous rendre visite. Assise à l'ombre, près du puits, elle donnait son avis, commentait le moindre de nos gestes. Pas comme ça... Oh, non, il ne faut surtout pas arroser! Pour de temps en temps, nous gratifier quand même d'un C'est bien. Là, oui, c'est bien. Il faut dire qu'elle a toujours aimé le jardin. Une vraie échappée belle. Rue d'Avelghem, à Roubaix, elle semait, repiquait, bouturait, s'occupait des légumes, installait les massifs. Chez elle, les fenêtres, le balcon, étaient envahis de plantes en pot. Et lorsqu'elle est venue vivre ici, à L'Humelière, elle passait ses journées à bichonner ses fleurs. Il y a deux ans, son propriétaire a vendu. On a construit à la place de sa minuscule villa, un de ces pavillons hideux. Tout le terrain a été nivelé au bulldozer. Un crève-coeur. La semaine précédente, ma cousine et moi avions été sauver ce que nous pouvions de rosiers, de vivaces. J'ai embarqué toutes les pivoines. Elles commencent seulement à s'acclimater. Georgette habite aujourd'hui dans deux pièces au rez-de-chaussée d'une courette goudronnée. Dieu sait si je les écoute, ses conseils...

samedi 21 juin 2008

Vendredi 20 juin. 22h00

Je n’avais pas enregistré depuis le début mai. C’était ma reprise à Jeux d’épreuves. Ca a ressemblé à un vrai retour au front. Je présentais Placement d’Eric Rondepierre. Le livre a reçu une bordée de critiques que j’ai paré comme j’ai pu. J’ai du mal à comprendre que ce texte puisse susciter du rejet. Sans doute parce que c’est l’histoire d’une terrible injustice faite à l’enfance. Mais pas seulement. La démarche me paraît d’une grande pureté, nécessaire dans ses allers-retours, dans sa lente construction. Pourvu qu’on ait entendu un peu ma voix…

J’ai cavalé pour récupérer la valise et retrouver Amélie à la gare. Retour. Ca va être une vraie semaine et j’en ai besoin. Une soupe de légumes au jardin. Un verre de rasteau ou deux. On se couche, il fait encore jour. C'est bien.

vendredi 20 juin 2008

Jeudi 19 juin. 23h50

J'ai travaillé la journée entière chez Buchet sur ce prochain volume de « Domaine Public » dont je ne vois toujours pas la fin. Il y a comme une malédiction. Une partie des fichiers a sauté. Toute la chronologie et la bibliographie sont à refaire. Je m'y remets la semaine prochaine. C'était la première journée du Marché de la poésie, place Saint-Sulpice. Le ciel était gris d'avant pluie. Peu de monde. Tout faisait un peu triste. Je suis passé embrasser Jeannine sur son stand de la Fondation Maurice Carême. Petite souris grise. Elle a maintenant quatre-vingt-deux ou quatre-vingt-trois ans. Je l'avais rencontrée en 1999 pour le supplément belge de Point de Vue. Il s'était passé quelque chose d'immédiat et d'assez troublant. Nous avions parlé longtemps, longtemps. Elle m'avait raconté, presque au jour le jour, son aventure amoureuse avec Maurice. Elle l'avait rencontré quand elle avait seize ans... Les voyages, les poèmes. Elle avait sorti les albums de photos et les lettres. Carême avait beau être mort en 1978, il était là pourtant, incroyablement présent. Je n'avais pas du tout envie de quitter le salon de cette petite maison blanche d'Anderlecht. Au jardin, j'avais chipé deux brins de sedum sur la rocaille. Ils couvrent plus d'un mètre à Carolles aujourd'hui. Essaye de repasser avec Amélie, sinon embrasse-la pour moi. Et elle a ajouté comme à chaque fois : Ca ne te coûtera pas beaucoup! J'ai filé. J'ai bavardé un moment, au Castor Astral, avec Bénédicte. On se voit pas souvent. Cette fois-ci, c'est promis, nous déjeunons à la rentrée.

J’avais réservé au soir une table chez Moissonnier pour fêter l’embauche de Marie. Nous avons trinqué à son avenir tout neuf avec du mâcon frais.

jeudi 19 juin 2008

Jeudi 19 juin. 1h00

J'ai trouvé qu'il y avait trop de monde rue de Chateaudun. Les éditeurs, les attachés de presse, les auteurs, les journalistes. Je me sentais comme il y a des années. Un peu sot, étranger. Provincial, pour le dire vraiment. C'est que je crois que je suis encore quelque part à Carolles. Je repars vendredi. D'une certaine manière, je suis content de ne pas avoir le temps de renouer mes fils d'habitude. Amélie était très belle au milieu de tous ces gens. Nous avons filé au dîner du « Club » de Nadine, chez Jean-Claude et Nicky Fasquelle. Une petite maison au fond d'une impasse. La table était dressée au jardin. Ca m'a rassuré, ce lieu entre parenthèses. Il y avait Christine, Nathalie... Etre en bonne compagnie. Pas moyen de dire autrement. Nous sommes rentrés à pied par la rue Péclet. Un peu fatigués. Contents. Trois jours qu'on ne s'était pas vus.

Mercredi 18 juin. 19h00

Retour vers Paris, j'ai relu dans le train ce que j'avais écrit hier. Avancé un peu. corrigé déjà surtout. J'avais rendez-vous avec Nicole, rue de l'Arbalète. Nous avons parlé longuement de l'avenir de sa maison. Ce n'est pas qu'elle s'inquiète, ni qu'elle se décourage, bien au contraire, mais il lui faut toujours des perspectives fraîches. Elle va publier de magnifiques textes. Son catalogue est impressionnant. Qu'est-ce que je peux faire pour elle? Quelques idées, quelques contacts. C'est tout pour l'instant. Je n'ai ni les moyens, ni les jours, de travailler bénévolement. Pourtant, je suis si attaché à Caractères... Je vais réfléchir au comment. Ce n'est pas une dette que j'ai là. C'est un devoir de temps. Je n'avais pas seize ans quand j'ai poussé la porte de Bruno Durocher, par hasard, rue Sainte-Marthe. Il a publié mes poèmes. Il m'a laissé ce sentiment que c'était possible, tout simplement.

Marie a appelé en fin d'après-midi. Grande nouvelle. Elle commence en septembre dans sa galerie d'art. Je suis soulagé. Heureux pour elle. Georgette priait saint Joseph. Je croisais les doigts. J'y pensais sans cesse. Je pars rejoindre Amélie au prix des lecteurs de L'Express. C'est Nathacha qui l'a obtenu et là aussi, je suis content.

mardi 17 juin 2008

mardi 17 juin. 23h15

J'ai commencé ce matin. Je vais juste m'en taire. Je m'acharne jusqu'au bout. J'avance dans mes comptes, jour à jour, ligne à ligne, dans ma propre boutique. Silence, silence, silence. C'est tellement difficile et impossible à dire. Je ne réponds de rien.

La journée était douce à travers la fenêtre. Fabien est passé au soir avec la jante rouillée que je lui avais demandée pour enrouler le tuyau d'arrosage. Nous avons dîné du reste de gigot de dimanche. Pomerol et moutarde. Je rentre demain à Paris pour deux jours. Je n'en ai pas envie, vraiment pas. S'il n'y avait Amélie.

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