J'ai déjeuné avec Marie-Françoise chez Paul, place Dauphine. Nous avons parlé du temps comme il advient. Et de ce qu'il fabrique. Il n'y avait pas mieux que cet endroit pour raccrocher les années. Pour comprendre comment elles se tissent. Imperceptiblement. C'est encore un hasard. Mais je suis si content qu'elle m'ait fait retrouver ce petit périmètre. Comme on laisse les lieux et comme on s'en souvient... Quand j'habitais rue de l'Arbre-Sec, je venais souvent lire ici. C'est à ne pouvoir s'y méprendre, le sexe de Paris qui se dessine sous ces ombrages. Je pensais à Nadja et j'avais dix-huit ans. J'avais acheté à l'époque dans une librairie qui n'existe plus les six tomes du Vicomte de Bragelonne gravés par Dutertre. Une fortune. J'allais boire timidement un verre de pouilly au tabac Henri IV. Je rêvais d'un bureau de bois clair exposé à la vitrine d'Aliette Texier. Nous avons parlé longtemps avec Marie-Françoise. Je n'avais pas envie de partir. Le restaurant était vide quand nous nous sommes levés de table. Je reviendrai. Merci. J'ai juste pu être à l'heure pour rejoindre Marie à Denfert-Rochereau. Un verre sur la place. Quelques pas. L'orage nous a arrêté sous un auvent rue Daguerre. Nous avons forcé quelques mètres jusqu'à la librairie Boulard. Elle cherchait un cadeau pour une amie chez qui elle se rend ce week-end à Bruxelles. Elle semble en harmonie avec elle-même, Marie, et je m'en émerveille. Au soir Delphine et Marie-Sophie étaient à la maison. La soirée s'est passée amicale et douce. Je n'ai pas écrit une ligne, mais quelle belle journée...