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mercredi 8 juillet 2009

Lundi 6 juillet. 23h50

Le train de 6h00 attrapé tout juste. J’étais lent ce matin. Nous avons pris un café gare Montparnasse. Amélie a filé à son travail. J’ai traînaillé dans l’appartement. Pas fait grand chose. J’ai pris un café avec Béatrice pour parler des livres de rentrée chez Gaïa. Il s'y trouve le premier roman d’une jeune femme, Terre des affranchis, qui semble vraiment intéressant. Une histoire sombre dans la Roumanie de Ceausescu où le surnaturel s’enroule à la vie âpre. J’avais rendez-vous chez l’ophtalmo. Il me faut maintenant, en plus, des lunettes pour voir de loin. Pas besoin de les mettre tout le temps!, m’a-t-il fait bonhomme. Je m’en vais en morceaux. J’ai l’impression d’être un vieux chien fatigué. J’ai retrouvé Amélie. Quand elle est là, je revis. Nous sommes allés rue Bonaparte chercher la robe qu’elle mettra le 25. Très simple, courte, en lin blanc. Oui, elle sera vraiment magnifique, Amélie. Nous étions invités à dîner chez Elodie et Pierre, boulevard Voltaire. Je ne suis pas le meilleur convive qui soit en ce moment. Mais tout était bien. Chaleureux, amical. Je dirais : reposant…

Dimanche 5 juillet. 23h30

Marianne a perdu sa grand-mère. Quatre-vingt-dix-huit ans. La vieille dame vivait depuis quelques années dans une maison de retraite. Je me souviens du moment où il avait fallu débarrasser son appartement. Marianne avait entassé chez elle tout un fourniment de meubles, de bibelots, d’objets divers. Elle nous avait donné une table sur laquelle je travaille maintenant à Paris. Elle doit être très triste. L’âge ne fait rien au chagrin. Tout cela ne se raisonne pas. J’ai beaucoup d’admiration pour le courage de Marianne. Depuis qu’elle a été flanquée à la porte du Bateau livre, avec Amélie et Martin, elle vivote de lectures et de corrections de manuscrits. Une tâche ingrate. Indispensable mais jamais reconnue. Dernière péripétie en date, elle a fait un énorme travail d’éditrice pour le prochain polar de Jean-Christophe Grangé, La forêt des mânes, à paraître en septembre. Une fois tout terminé, Albin Michel lui a proposé royalement 500 €. Elle en a arraché 750 après une âpre discussion. Ca fait 10 € de l’heure. Quel mépris. Quelle honte… Elle viendra à Carolles « garder » la maison en juillet quand nous serons dans le Sud. Nous passerons un moment avec elle avant. J’ai terminé mon portrait de Guy Goffette. Juste à temps pour que nous puissions aller à la plage. Il y avait de très grosses vagues. Nous sommes restés dans l’eau une bonne demi-heure. Allez, on rentre. Il faut ranger un peu.

Samedi 4 juillet. 23h00

Amélie est partie au marché à Granville. Je suis resté à la maison écrire mes papiers. Nous nous sommes échappés dans l’après-midi pour aller voir Georgette. Elle a à nouveau bon moral depuis qu’elle a refusé qu’on aille plus avant dans les examens médicaux pour sa mâchoire. Ils voulaient faire une biopsie. Tu te rends compte… Passé chez Ciboulette, la modiste du village, pour passer commande du chapeau d’Amélie pour la cérémonie à Antibes. Quelque chose de grand, de rouge, de fleuri. Elle aura fini dans une semaine. Amélie sera magnifique.

Vendredi 3 juillet. 22h15

J’avais ménagé la surprise. Amélie a découvert le potager. Encore plus en abondance que la semaine dernière. Nous avons défait la bâche du tunnel. Découvert, déjà, deux melons sous le feuillage rampant. Il y a des piments aussi. Nous avons travaillé sur place jusqu’au soir et nous sommes descendus à la plage, les mains noires de terre. La mer était loin. Nous avons marché longtemps jusqu’à mi-cuisses avant de pouvoir nager.

Vendredi 3 juillet. 1h20

J’ai avancé mon départ pour Carolles. J’ai essayé de travailler dans le train, mais j’avais l’esprit ailleurs. Tellement ailleurs que je me suis aperçu en chemin que j’avais oublié que j’avais rendez vous pour déjeuner avec Karine, Solveig et Vanessa. J’ai appelé chez Stock pour m’excuser. Je n’ai pas fait grand chose de la journée. Paillé les rosiers derrière la maison. Lu un peu. Attendu Amélie surtout. Elle est arrivée très tard. Il était tombé un long orage en fin d’après-midi. La nuit sentait la terre mouillée.

jeudi 2 juillet 2009

Mercredi 1er juillet. 23h20

J'ai terminé mon papier. Parlé avec Isabelle des projets de rentrée pour Le Pèlerin. Un portrait d'André Bucher qui publie La Fontaine aux miroirs chez Denoël. Un autre d'Armel Job pour Tu ne jugeras point chez Robert Laffont. Je vais les appeler la semaine prochaine. Je les connais tous les deux. Je suis leur travail depuis un moment. Elle m'a confié également trois ou quatre petites recensions. Eu Florence aussi au téléphone pour les sorties en littérature étrangère au Monde. Je lui rends déjà deux articles pour le prochain numéro : Le violon d'Auschwitz et 2500 signes sur la nouvelle traduction d’Alice au Livre de poche. J’ai trouvé cela un peu court pour l’événement, mais je n’ai pas beaucoup protesté, tant je suis content de pouvoir en parler. Depuis que Laurent m’avait annoncé qu’il s’était mis à ce travail, j’attendais avec impatience… Il a remarquablement réussi. C’est, avec celle de Jacques Papy, une des traductions les plus fidèles au texte original et à l’esprit de l’auteur. Dernière en date, elle tire leçon et profit des autres. Elle se sort des chausse-trappes (phrases à double sens, calembours, quiproquos, fautes volontaires, mots-valises) partout placées dans le texte. Et surtout (rien qu’un exemple : choisir La traversée du miroir plutôt que De l’autre côté... pour Through the Looking-Glass…), elle est infiniment proche du sens. J’ai envié Laurent d’avoir pu se lancer dans cette tâche à laquelle j’aurais tant aimé, moi aussi, me risquer. J’ai découvert Alice seulement à la fin de l’adolescence et je me souviens de cette lecture comme d’une invraisemblable émotion. J’avais tout dévoré à la suite. Depuis, Lewis Carroll ne m’a plus quitté. En 1998, j’étais parti en reportage en Angleterre pour le centenaire de sa mort. A Guildford, j’avais assisté à un office à l’église où il prêchait le dimanche. Fait le tour de sa maison des « Chesnuts ». Sur sa tombe, j’avais ramassé une poignée de terre. Toujours pieusement conservée. Je voudrais retourner là-bas. Encore une fois. En début de soirée, Amélie m’a accompagné, rue du Cherche-Midi, chez le médecin spécialiste. Une dame charmante qui a déployé des trésors de gentillesse pédagogique et rassurante. N’empêche, j’ai bien entendu : je suis malade et je ne guérirai pas. Il va juste falloir vivre avec. Sorti de là avec une ordonnance pour des examens, un traitement. J’étais tendu comme une chanterelle. Allons dîner. Il était tard. Chez Christelle, à Midi vins, un peu plus bas dans la rue, j’ai commandé du chinon blanc.

mercredi 1 juillet 2009

Mardi 30 juin. 22h40

Nouveau déjeuner pour la rentrée littéraire. Avec Nathalie à La Cigale-Récamier. J'ai salué Gérard, le patron, toujours gentiment empêtré dans des bonjours aux « célébrités » qui fréquentent sa table : journalistes, politiques... Que du beau monde. L'autre jour, à dîner, il avait même Michelle Obama et ses filles. C'est dire... Je l'ai connu dans les années 1990 quand il avait repris un restaurant rue Chomel, La Cigale, justement... Il y faisait déjà de magnifiques soufflés. J'y allais très souvent avec Alain que je ne vois plus depuis mon départ de Point de Vue. Alain a pris sa retraite à Concarneau. On s'est bêtement brouillés au sujet d'un manuscrit qu'il m'avait adressé. J'ai commencé de rédiger mon papier sur le Père Brown. il faudrait que je prenne le temps de m'intéresser davantage à Chesterton, singulier auteur « chrétien », dont l'oeuvre dépasse de loin ses nouvelles policières. J'aime vraiment ces écrivains anglais du tournant du XIXe et du XXe. Pas de nouvelles de mon Jerome K. Jerome, d'ailleurs. Je vais rappeler chez Omnibus. Amélie est rentrée. Trente degrés. L'air était moite. Dîner léger...

mardi 30 juin 2009

Lundi 29 juin. 23h00

Nous avons fait traîner un peu le petit déjeuner. Amélie est partie travailler. J'ai terminé la lecture des Enquêtes du Père Brown de Gilbert Keith Chestertown. Brown est un prêtre, rondouillard et myope, qui parvient à dénouer d'invraisemblables intrigues criminelles. Je dois écrire un papier sur lui pour la série d'été du Pèlerin. A la première personne... L'appartement était étouffant. Je l'ai fui en fin d'après-midi pour retrouver Amélie. Nous étions invités au Divan du monde pour la soirée de rentrée littéraire des éditions JC Lattès. Embrassé Brigitte, dit bonjour à gauche et à droite. Il y avait Akli avec qui nous avons bavardé un moment. Nous sommes partis quand la musique a commencé à atteindre un volume dissuasif. On ne s'entendait plus. Métro bondé. Le trajet a semblé interminable jusqu'à Vaugirard. Retour à pied doucement. Un Perrier au tabac de la mairie. Mon Dieu, qu'il faisait chaud.

Dimanche 28 juin. 23h45

A peine le café avalé, je suis retourné à mes confitures. Cinq minutes de cuisson à petits bouillons. Soigneusement écumer. Vérifier la nappe. J'ai peut-être laissé traîner. Le résultat risque d'être un rien... compact. Pas sûr. Ce sera la surprise à l'ouverture des pots dans quelques semaines. J'en ai rempli une douzaine. Davantage que l'an dernier. J'en ai apporté un à Georgette après avoir passé le contenu au mixer. Pour mon goût personnel, je préfère garder les minuscules peaux, les pépins. Géraldine, Vincent et Alexandre étaient retournés à la plage. J'ai planté le rosier qu'ils avaient offert pour notre mariage. Un Pierre de Ronsard grimpant. Je l'ai installé à l'arrière de la maison contre la vigne. Les baigneurs sont remontés avec un Alexandre bien fatigué. Il s'est installé dans la chaise longue et n'a plus bougé. J'aime bien ce petit garçon solitaire. Inquiet. A la fois sage et pas facile. Il me renvoie tellement à celui que j'étais. Il va avoir six ans le 10 juillet. Tous les trois sont partis après déjeuner. La longue route, les bouchons des retours du dimanche. J'ai rangé. Rassemblé les affaires. Ecrit un petit papier pour Le Monde sur La condition d'Eustachy Rylski. Aux Fontenelles, Jean-Claude m'avait demandé de lui laisser dehors un arrosoir et un seau pour prendre l'eau au puits. Grâce à lui, les légumes attendront notre retour sans problèmes. J'ai cueilli pour Paris une laitue, une romaine, des radis, des oignons, un énorme bulbe de fenouil. Dernier tour au jardin. J'ai attrapé le train à Granville. Pas de retard, heureusement. Une demi-heure après l'arrivée, je retrouvais Amélie. Comment s'est passé ton week-end ? - Comme toi. J'attendais juste ce moment-là.

Samedi 27 juin. 23h20

La matinée à la plage. Alexandre voulait voir la mer. Mais rien à faire pour l'y faire entrer. Elle est trop glagla, répétait-il en sautillant d'un pied sur l'autre. J'ai nagé un long moment. L'eau était juste fraîche. Tout était entouré de brume de chaleur. On ne voyait ni les îles, ni le Grouin de Cancale, ni même Granville. Le pignon Butor se cotonnait dans un vaporeux brouillard. Nous avons déjeuné sous le sapin. J'ai emmené tout le monde ensuite au potager cueillir les cassis. Les pieds du fond étaient chargés de lourdes grappes, bien noires. Avec Géraldine, nous avons égrené la récolte : presque quatre kilos. J'ai ajouté le sucre, le jus de deux citrons et donné un premier bouillon dans la bassine à confitures. J'ai versé la préparation dans une terrine. Il faut que ça macère une nuit entière.

Samedi 27 juin. 3h10

Nous sommes séparés. Amélie part trois jours au Festival du roman noir de Frontignan. Nous avons pris le train chacun de notre côté. J'étais à Granville en milieu de matinée. Les courses au supermarché pour Georgette. Je suis passé les lui déposer tout de suite. Tu n'as rien oublié ? Hier, elle était à Rennes avec Josette et Jean-Claude pour visiter le parc du Thabor. Il y avait des roses magnifiques, tu sais... Depuis que le médecin, à Avranches, a cessé de l'inquiéter (le scanner est normal, lui a-t-il dit) , elle reprend goût à tout. J'ai mis de l'ordre dans la maison. Nettoyé le jardin, ratissé la cour. Géraldine, Vincent et leur petit Alexandre viennent passer le week-end. Chaleur de plomb. Pas un souffle de vent. J'ai été aux Fontenelles pour arroser. Les poireaux de la semaine dernière avaient bien triste mine, mais tout le reste était magnifique. Oignons, échalotes, radis, haricots, fenouils, salades. Ca avait poussé de manière incroyable. De véritables légumes de concours. Les tomates étaient en impressionnants buissons autour des tuteurs. Du jamais vu dans mon expérience potagère. J'ai cueilli une énorme laitue rouge. Je suis rentré préparer le dîner. Des bulots, des langoustines, des cerises jaunes du verger de Mme Bassard. Mes invités sont arrivés très tard. Vincent, emporté sans doute par la monotonie de l'autoroute, avait continué jusqu'à Pontorson. Pour un peu, ils étaient au Mont-Saint-Michel.

lundi 29 juin 2009

Jeudi 25 juin. 21h50

Déjeuner chez Cagnat, rue Christine avec Emmanuelle et Aurélie pour la rentrée d’Actes Sud. J’espère pouvoir m’occuper, au Monde, du dernier roman de Jean-Yves Cendrey, Honecker 21. Ce serait encore mieux s’ils me laissaient aller à Berlin pour faire un portrait. Je me sens une proximité littéraire comme « instinctive » avec Cendrey, bien que nous n’écrivions pas du tout de la même manière et avec des préoccupations, semble-t-il, bien différentes. C’est la raison pour laquelle, d'ailleurs, j’avais eu beaucoup de mal à rédiger le papier sur son précédent livre, La maison ne fait plus crédit, paru à L'Olivier. J’aimerais assez élucider cela. Il y a aussi Les identités remarquables de Sébastien Lapaque que je viens juste de commencer et peut-être le Metin Arditi (Loin des bras), ce dernier pour Le Pèlerin. Dans ces moments de projets, j’aime autant entendre parler des livres et en parler aussi que de les lire. Le temps de la vraie lecture est juste un peu plus loin. Réunion chez Buchet dans l’après-midi. Derniers échanges au sujet de « Domaine public ». Pour que tout soit bien clair. Tout l'est malheureusement. J’ai tourné la page, plus de raison de s’attarder...

Mercredi 24 juin. 22h30

J’ai décrypté mes notes pour le portrait de Guy Goffette. Déjeuné au soleil à la terrasse du J’Go avec Marion pour parler de sa rentrée au Mercure. J’ai chipoté dans mon assiette. Pas vraiment d’appétit. J’ai fait des analyses de sang. Mon taux de sucre est beaucoup trop élevé. A lire les résultats, j’ai l’impression d’être le camion de nitroglycémie dans Le salaire de la peur. Rendez-vous est pris chez un médecin spécialisé la semaine prochaine. On verra… Je suis rentré rapidement préparer ma présentation du recueil de nouvelles d’Anna de Noailles, à paraître en octobre, pour la réunion des représentants de Volumen. Cela se passait dans une salle sans fenêtres au sous-sol de l’hôtel Mercure de la rue la Gaîté. Sinistre. J’ai été très bref. Deux mots sur l’auteur, sur la modernité du livre, car Les Innocentes est vraiment un texte surprenant. C’est le dernier volume de la collection. Je vous le confie. Que dire d’autre ? J’ai retrouvé Amélie pour aller dîner à la Villa corse avec Jacques, un de ses amis qui vit depuis plus de dix ans à Hong-Kong. La banque, le commerce, je n’ai pas complètement compris. Je les ai écouté déplier leurs souvenirs comme des petits papiers. Des riens, des anecdotes. Tous les jours j’apprends à mieux connaître Amélie.

Mardi 23 juin. 23h10

La journée est tombée dans un trou noir. Des rendez-vous sans fin et du temps à tuer. J’en ai profité pour relire Juste pour le plaisir, le dernier roman de Mercedes. Livre sombre des années sombres, puisque de la fin de la guerre d’Espagne au procès Barbie, il va, ressassant, sans cesse, une histoire naturelle du Mal. Guère d’espoir. La terre n’est qu’une gigantesque fosse commune où gisent, côte à côte, les victimes et les bourreaux. Nous débattions ensemble au premier étage du Café de la mairie, place Saint-Sulpice. Chacun présentant le livre de l’autre. Mine de rien, nous étions assez émus de l’exercice. Mercedes a dit des choses très touchantes sur La mort de ma mère. Pas grand monde dans l’assistance. A peine une dizaine de personnes. Mais nous avons répondu à beaucoup de questions. Une jeune femme m’a même demandé pourquoi je n’écrivais pas pour le théâtre. Vous pourriez entendre votre voix. Le théâtre? Honnêtement je n’y ai jamais pensé. Je ne pense pas en être capable d’ailleurs. Mais tous ces mots font leur chemin. L’intérêt que ces gens me porte m’étonne à chaque fois. Et à chaque fois me fait du bien.

dimanche 28 juin 2009

Lundi 22 juin. 23h45

J’ai rejoint Diane pour déjeuner rue de Vaugirard. C’était la première fois qu’on se voyait vraiment depuis son départ de Buchet en mai de l’année dernière. Après un remplacement chez Grasset, elle s’occupe maintenant de littérature étrangère chez Belfond. Cela a l’air de lui aller plutôt bien. Je rencontrais en début d’après-midi Antonio Caballero, un de ses auteurs de rentrée. Belfond traduit Un mal sans remède, son seul roman, publié en Colombie il y a vingt ans. C’est une succession d’aventures picaresques qui surviennent à un poète et qui ont pour décor un Bogota violent et surtout absurde. Nous étions installés dans le patio de l’Hôtel de l’abbaye, rue Cassette. On parlait poésie, justement. La réalité n’a aucune importance, m’a dit Caballero. Il a tellement raison. Soirée d’anniversaire chez Catou et Jocelyn à Romainville. Le bout du monde… Nous y avons retrouvé Marianne. On s’est échangé les nouvelles au milieu de plein de gens que je ne connaissais pas. A la nuit tombée, Amélie a donné le signal du départ. En arrivant à l’appartement, nous nous sommes aperçus que nous avions quitté la fête vraiment de bonne heure…

Dimanche 21 juin. 23h00

Nous avons dû avancer notre retour à Paris. On s’est quittés un peu bizarrement à la gare. J’avais rendez-vous au marché de la poésie place Saint-Sulpice avec Guy Goffette pour un portrait dans Le Monde. J’ai eu le temps, avant, d’aller embrasser Jeannine sur son stand de la Fondation Maurice Carême. Elle est toujours aussi vaillante, bavarde, rieuse. Toujours à faire rayonner l’œuvre et la mémoire de son cher grand homme. Elle aura finalement passé plus de temps avec son ombre qu’avec lui vivant. Vous venez quand me voir à Bruxelles ? J’ai emmené Goffette au Café de la mairie. La terrasse était pleine. Nous avons bavardé presque deux heures coincés à une table minuscule au fond de la salle. Son enfance, la Gaume, les livres. On entendait dehors la cacophonie des orchestres de la fête de la musique. Déjà l’été… Presqu'elles, son dernier recueil de « récits », laisse cette impression troublante de déjà vu-déjà vécu. De petites expérimentations intimes, personnelles, partagées. Des femmes croisées, sans paroles ou si peu. Elle regarde par la vitre le paysage monotone. Je vois son cou très lisse, le tendon de son cou, un morceau de sa nuque, un morceau pâle sous la masse noire des cheveux. Il publie aussi un long poème, Tombeau du Capricorne, dédié à Paul de Roux, poète, aujourd'hui, à la mémoire morte et aux mots empêchés. J'ai quitté Goffette à regrets... Retrouvé Amélie avec Marion et Jérôme au MK2 de la rue Jules Chaplain pour voir le film de Tavernier, Dans la brume électrique, tiré du roman de James Lee Burke, paru chez Rivages à fin des années 1990. Je suis resté, à mon corps défendant, très spectateur de l'histoire. Sans émotion. Je ne sais plus aller au cinéma, en fait. Nous avons dîné dans un chinois juste à côté. J'aime bien les soirées avec Jérôme et Marion. On apprend juste à se dire des riens. Je n'en finis pas de m'apprivoiser.

Samedi 20 juin. 22h15

Un tour au village. Une visite à Georgette. Lecture. Quelques notes. Nous ne sommes pas descendus à la plage malgré le beau temps : trop de monde. La saison arrive et ça me rend sauvage.

mardi 23 juin 2009

Vendredi 19 juin. 22h50

Le marché à Sartilly avec Georgette. Cela faisait plusieurs fois qu’elle voulait nous y accompagner. Mais le froid, la fatigue… Ca ne fait rien, je me suis dit que, cette fois, il fallait que je vienne. Nous avons remonté les étals à tout petits pas avec elle. Elle a fait des courses minuscules. Une lamelle de brie, une barquette de fraises. Amélie s’est acheté un bout de toile cirée pour se faire confectionner un chapeau de pluie. Je me suis arrêté devant les poules et les canards. Il y avait une caisse où pépiaient des poussins jaunes. Après le potager, un poulaillier ? Comme celui du bout du jardin de la rue d’Avelghem. Je sais, je sais, ce n’est pas possible… Aux Fontenelles, nous avons repiqué des poireaux. Les voisins (du fond) avaient fait abattre leurs cyprès. Toutes les branches sont tombées sur nos pommes de terre. Un massacre de feuillage et de fleurs. Leurs mauvais bûcherons ont aussi endommagé la clôture des voisins (d’à-côté). Ils venaient d'arriver pour le week-end. Nous sommes restés ensemble, un instant, à nous plaindre de nos dégâts respectifs.

vendredi 19 juin 2009

Jeudi 18 juin. 23h50

Amélie a avalé ses tartines en vitesse. S’est brûlée avec deux cafés. Un petit baiser sur le palier. Elle a filé à son nouveau boulot. Elle y passe juste la journée. Prises de contact, réunions. Elle reprendra ensuite lundi jusque mi-juillet. Les « choses sérieuses » commenceront vraiment à la rentrée. J’ai revu les livres pour Jeux d’Epreuves. Je participais à deux émissions à la suite aujourd’hui. Je commençais par Des roses rouge vif d'Adriana Lisboa chez Métailié. Josyane présentait Arabesques de Robert Dessaix au Mercure de France, Frédéric, Une musique en train de se faire du compositeur Pascal Dusapin au Seuil et Minh, Codicille, de Gérard Genette au Seuil aussi. A la seconde, j’enregistrais Le restant de nos jours de Peter Kihlgård chez Actes Sud. Clara parlait de la réédition au Castor Astral de Nouvelle histoire de Mouchette de Georges Bernanos. Cécile des Lettres à Albert Paraz, de Louis-Ferdinand Céline chez Gallimard et Jean-François de Mangez-le si vous voulez, de Jean Teulé chez Julliard. Tout cela était… très ecclectique. J’ai eu beau m’acharner n’ai rien compris du tout (je l’ai dit d’ailleurs du mieux que j’ai pu…) au livre de Dusapin, amphigourique produit de son cours à la chaire de création musicale du Collège de France. Partitions, graphiques, fractals et forme isochrone. Je repensais aux leçons de de M. Jacquet, en sixième, qui nous scandait, la taloche en suspend : La musique est l’art d’accomoder les sons d’une manière agréable à l’oreille. Impossible pour moi de combler le fossé… J’ai défendu mes titres comme j’ai pu. Le roman d’Adriana Lisboa a fait l’unanimité, celui de Peter Kihlgård, nettement moins. Il s’agit pourtant d’une très troublante histoire d’amour qui commence par la fin : le suicide des deux époux harassés de douceur. Aucune mièvrerie. J’avais senti ce texte tellement vrai, tellement sincère. En refermant le livre, j’étais allé chercher dans la bibliothèque le Poème à crier dans les ruines d’Aragon. Il me semblait faire comme un contrepoint parfait au texte. J'en ai cité un extrait pour l'occasion. Ils en ont de bonnes ceux/
Qui parlent de l’amour comme d’une histoire de cousine/
Ah merde pour tout ce faux-semblant/
Sais-tu quand cela devient vraiment une histoire/
L’amour/
Sais-tu/
Quand toute respiration tourne à la tragédie/
Quand les couleurs du jour sont ce que les fait un rire/
Un air une ombre d’ombre un nom jeté/
Que tout brûle et qu’on sait au fond/
Que tout brûle/
Et qu’on dit/ Que tout brûle/
Et le ciel a le goût du sable dispersé/
L’amour salauds l’amour pour vous/
C’est d’arriver à coucher ensemble/
D’arriver/
Et après Ha ha tout l’amour est dans ce/
Et après/
Nous arrivons à parler de ce que c’est que de/
Coucher ensemble pendant des années/
Entendez-vous/
Pendant des années. Grand bonheur aussi à soutenir le choix de Clara. Mouchette est un des plus beaux textes de Bernanos avec Le journal d’un curé de campagne. J’avais proposé, sans succès, un papier dans Le Monde. Le Castor Astral republie toute l’œuvre de Bernanos et c’est un immense bonheur. Nouvelle histoire de Mouchette n’était même plus disponible en poche. Pour le reste, j’ai un peu pataugé. Joseph m’a fait remarquer à deux reprises ( à propos de Gide, dans Arabesques et pour Céline) qu’un écrivain n’avait pas à être sympathique. Il avait raison bien sûr. Rien à rétorquer. N’empêche. Je n’y peux rien, j’ai besoin de me sentir en empathie. J’ai retrouvée Amélie à La petite Bretagne après sa première journée de travail. Trop juste pour qu'elle ait vraiment quelque chose à raconter. Elle était fatiguée, enrhumée. Trois heures de train. Nous étions de retour à la maison.

Mercredi 17 juin. 17h40

J’ai fait une courte interview téléphonique d’Ariane Chemin pour le site d’Hachette. Journaliste au Monde et maintenant au Nouvel Observateur, elle a publié en avril Fleurs et couronnes chez Stock. Le livre fait le récit curieux de six enterrements. Aucun voyeurisme, rien de morbide. La fidélité, l’hommage, simplement. L’écriture est particulièrement sensible. Et surtout juste. Funérailles officielles, funérailles de gens célèbres. De pauvres aussi. Elle parle notamment de celles de Rafaël Kuderski, « l’inconnu de la Concorde », ce SDF retrouvé mort de froid en décembre 2007 dans les bosquets de l’avenue Gabriel et auquel elle était parvenue, au terme de son enquête de terrain, à rendre un nom, une identité. Elle commence son petit cortège funéraire avec Gérard Brach, le scénariste de Polanski. Je le connaissais. Nous nous voyions souvent du temps de mon travail de rédacteur en chef de Point de Vue, quand je fréquentais La Marlotte, rue du Cherche-Midi. Il habitait à deux pas, rue de Bérite, et venait y déjeuner tous les jours, ou presque, avec Elisabeth, sa femme. C’était sa seule sortie de reclus volontaire, effrayé à l'idée même d’affronter le dehors. Lucie nous avait présentés. Je m’installais quelquefois avec eux à la table ronde de l’entrée. Il m’avait parlé de son passé de très jeune homme se retrouvant tragiquement du « mauvais côté » à la fin de la guerre. Lucie a vendu La Marlotte. J’ai été licencié. Je n’étais plus dans le quartier depuis un moment quand, un jour, j’ai croisé Elisabeth. Gérard est très fatigué. Vous devriez passer le voir. Ca lui ferait plaisir. Je n’y suis jamais allé. Il est mort à l’automne 2006. Je l’ai retrouvé dans le livre.

Un verre de kir chez Georgette un peu avant midi. Servez-vous, vous savez où c’est. Elle a pris la décision de balayer ses inquiétudes. De les oublier plutôt. Complètement. A côté du téléphone, elle avait noté la date du scanner à la polyclinique d’Avranches : mardi 23 juin. Je me suis hasardé. Tu as finalement pris un rendez-vous ? – Oh, ça je ne sais pas, il faut demander à Josette. Je ne m’occupe plus de ces choses. Je ne me souviens plus de rien maintenant… J’ai rempli les mangeoires des oiseaux. Nourri les poissons. Ramassé les figues tombées sur la terrasse et dans l’herbe. Amélie était un peu préoccupée. Elle commence sa première journée de travail chez Liana Levi demain. Nous rentrons à Paris ce soir.

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