Je vais probablement publier mon Herbier des rayons chez Caractères. Belin chez qui il devait sortir vient de se faire racheter par un réassureur (un assureur qui assure les assureurs…), probablement plus intéressé par l’hôtel particulier de la rue Férou où se trouve la maison d’édition que par son catalogue. Des tas de licenciements sont en cours et Geneviève Bouffartigue, mon éditrice a pris sa retraite. Elle aurait, semble-t-il, vaguement gardé un pied dans la place. Je n'ai guère eu qu'un ni oui ni non quand j'ai évoqué votre affaire, m’écrit-elle. Je vais donc remettre le projet sur le tapis de façon plus précise dès que je le pourrai. En tout cas, je ne m'en remettrai pas au silence pour vous dire non, si cela ne passe pas. Autant dire que c’est sans espoir. J’avais tenté Actes Sud par l’intermédiaire de Régine Le Meur qui s’était occupé de la presse de pas mal de livres de botanique et de nature chez eux. Envoie directement ton manuscrit à Bertrand Py m’a-t-elle conseillé après avoir « réfléchi ». Sauf que Bertrand Py à qui je serre la main quand je le rencontre et qui fait semblant de me reconnaître s’est débarrassé de mon texte sans même ouvrir l’enveloppe. C’était en mars. J’ai reçu un courriel du « service éditorial » : Ces quelques mots pour vous confirmer l'arrivée de votre manuscrit, lequel a été confié à notre comité éditorial. Vous recevrez donc une réponse quand nous aurons examiné votre texte. Nous vous demandons toutefois un peu de patience, compte tenu du nombre élevé de manuscrits qui nous parvient chaque jour. Ben voyons… J’ai déjeuné aux Petits plats avec Fleur. Parlé de la rentrée littéraire, de Morgiève et du Mondologue, le dernier roman de l’écrivain autrichien Heinrich Steinfest. Un hallucinant jeu de piste mêlant le nonsense et la métaphysique Le narrateur y est victime d’événements loufoques et tragiques à la fois. Il est blessé dans l’explosion d’un cachalot en plein centre-ville de Taina, se retrouve un des rares survivants d’une catastrophe aérienne en mer de Chine et finit, à la suite d’un deuil, par endosser la paternité d’un petit garçon de huit ans débarqué d’Asie et qui s’exprime dans une langue inconnue et incompréhensible. Je lui avais consacré toute ma chronique de mai dans Next. Ce sera d’ailleurs peut-être la dernière. Voire la fin de ma collaboration au supplément de Libé, car ce mois-ci, non contents d’avoir évacué la chronique, ils n’ont pas fait paraître les deux petits papiers que j’avais écrits sur Novalis et l’âme poétique du monde de Frédéric Brun et Faire avec de Lionel-Edouard Martin. Evidemment sans me prévenir, sans rien m’en dire. J’ai retrouvé Jérôme vers 18h00 porte d’Orléans. Il nous emmenait en voiture à Saint-Cloud. Nous étions invités chez Séverine et Gérald, à deux pas de chez lui. Il y venait aussi. Mais seul. Marion, fatiguée, avait préféré rester à l’appartement avec Gabrielle et Antoine. Nous sommes juste passés les embrasser. Le dîner était prévu pour fêter l’anniversaire de Thomas. Il a eu huit ans le 5. Je lui avais composé une boîte de papillons d’Amérique latine, des eurythides de Colombie et du Guatemala. La soirée, bizarrement tendue, s’est terminée en drame. Les enfants avaient été envoyés au lit tôt. Peu de temps après Thomas s’est mis à gémir. Il se plaignait d’avoir mal dans la poitrine. Affolement, appel au 15, au médecin des urgences… Nous nous sommes esquivés discrètement. Pauvre bonhomme. Il est pourtant le rescapé de la fratrie. Sa sœur Agathe a été opérée en 2009, tout bébé, pour un problème digestif. Puis ré-opérée et encore et encore. Nouvelle intervention cette année. C’est une petite fille de six ans très douce mais si craintive, si anxieuse. Son grand frère Arnaud a bien failli perdre un œil il y a deux ans en se blessant gravement avec une pointe de fer rouillée. Thomas jusqu’ici avait échappé à tout. Il ne faudrait pas qu’il s’imagine qu’il doit faire comme les autres. Pas simple de grandir dans ce climat d’angoisse silencieuse, à fleur d’instants. Nous étions rentrés depuis une petite heure quand Séverine nous a adressé un message : Thomas a fini par s’endormir. Le médecin parle de douleurs intercostales…