Il y a deux cent dix ans aujourd’hui mourait Jean-François de la Harpe. Mon étrange compagnon du XVIIIe siècle. Je pense à lui. Relu ce que j’avais écrit dans Le premier pas suffit : Le temps est en suspend. Pause respiratoire. Tu demandes qu’on récite la prière des agonisants. La litanie des saints. Ta main se lève à peine. À qui fais-tu un signe ? Jeannette sur ton front passe un linge mouillé. Ta voix dans un soupir. Timidement, elle répète à ces messieurs ce que tu as murmuré. « C’est consolant et beau. » Les voilà qui s’approchent contre le bois du lit. On dirait une gravure. Chambre du moribond. Mieux : Les derniers adieux. Tu essaies de sourire. La vie c’est du théâtre. Ou de la poésie. Sinon c’est impossible. Tu reniflais tes larmes dans la rue Saint-Victor. Tu n’avais pas dix ans et ton père était mort. Le froid de février s’insinue sous la porte. Tu ne peux plus bouger. « Et vous ma mère, vous, venez fermer mes yeux. » Encore Mélanie. Un filet de salive glisse au coin de ta bouche. Vendredi 11 février 1803. Sept heures du matin. Rideau. « C’est sans retour. »