Matinée de cours un peu clairsemée. Je peine à rassembler les étudiants. Ils ne sont jamais le même nombre, jamais vraiment les mêmes. Ce n’est ni de leur faute, ni de la mienne, juste la désorganisation administrative qui a emporté ce semestre. J’espère qu’ils retiendront malgré tout quelque chose. Un rien de curiosité, de l’attention à l’écriture… J’ai fini un peu plus tôt. Remonté à pied la rue Monge dans les premières tiédeurs de l'avant-printemps. Soleil et ciel bleu. Je me suis installé dans un café de la rue du Cardinal-Lemoine et j’ai écrit mes lettres aux filles à Mexico. A toutes les quatre. Y compris Apolline qui aura cinq mois en avril. C’est bizarre, non ?, d’envoyer du courrier à un bébé. Mais elle est si petite que j’ai pas d’effort à faire pour me rendre intelligible. Je n'ai pas à chercher les mots qui seraient dans son vocabulaire. Elle comprend tout aujourd’hui, bien évidemment. Je ne sais pas si elle lira ce que je lui raconte, un jour. Ce sera bien lointain. Je lui fais comme un matelas de mots pour les années qui viennent. J’ai retrouvé Amélie avec ses parents à deux pas, rue des Fossés-Saint-Bernard, chez Moissonnier. Déjeuner Lyonnais. Nous étions en appétit. Claire avait envie d’œufs meurette, Amélie de quenelles. Emmanuel d’une andouillette. J’ai pris un tablier de sapeur. Nous avons bu du mâcon frais. Il règne dans ce restaurant, incroyablement paisible, une atmosphère de province qu’on ne peut pas, qu’on ne peut plus, trouver en province justement. Une parenthèse calme, hors des lieux, du temps. Rien que le tintement des verres, le bruit des couverts. Les conversations douces. Tout y est simple, évident. Nous avons laissé Claire et Emmanuel au musée de Cluny et nous sommes allés au Salon du livre. J’ai accompagné Amélie sur son stand. L’inauguration commençait vers les cinq heures. La soirée a été longue d’allers retours, de rencontres dans les allées, de coupes de champagne et d’embrassades. Cohue au cocktail du prix RTL-Lire. Caméras et micros accompagnant la visite du ministre. Ca va, il est passé…. Je suis resté un moment chez Stock, attendu Laurence que je n’ai pas vue finalement. Raté Brigitte chez Lattès. C’est toujours ainsi. On ne trouve jamais ceux qu’on cherche, on brinqueballe d’un hasard à l’autre et on repart. Pas le temps de parler. J’ai croisé Mercedes. Attends-moi, je reviens. Promis de téléphoner à Géraldine, à Colette. Après le Salon…? Glissé des cartes de visite dans mes poches. On se voit bientôt. Oui, bientôt. Au fur et à mesure qu’approchait le moment de rentrer, une angoisse diffuse commençait à prendre le pas sur les conversations. L’an dernier (le 18, en fait…), à la même occasion, comme nous revenions à pied, nous nous étions fait renverser par une voiture, pas très loin de la maison. Ne pas penser à ça. Encore un verre ? Il y avait une file d’attente interminable aux taxis. Vu l’heure, nous n’avions pas vraiment le choix des transports et du trajet. Le tram, marcher le long de l’avenue du Général-Leclerc. On ne va pas traverser au même endroit quand même ?