Beaucoup de monde à Beaubourg. Le débat s’est poursuivi bien au-delà de l’horaire prévu. J’avais juste croisé Alberto Ruy-Sanchez au Salon samedi. Nous n’avions rien préparé ensemble, mais en quelques courtes questions nous sommes entrés comme en correspondance pour croiser son univers. Un étonnant Tout où se mêlent la prédestination, la fidélité à l’enfance, les élans créatifs, les sensations. Vocation d’écrivain. Chaque fois j’y pense… Les histoires s’écrivent dans l’écho des singularités et des similitudes. Il a parlé de ses premières années près du désert de Sonora, de sa grand mère fantasque qui emportait la vie entière dans une paraphrénie baroque, de ses obsessions religieuses, de sa jeunesse à Paris. Et puis de Mogador, son territoire sensible. Etre toujours le même n’avance à rien. Dans ce jeu de miroirs sans cesse déplacés où nous vivons, le sens de toutes choses se transforme à chaque instant ; nous flottons en permanence comme des poissons, dans l’humeur changeante des autres, nous peuplons les têtes troublées, les songes de ceux qui nous détestent ou nous désirent. Tout change, de nuit en nuit, dans les silences opaques qui nous rattachent les uns aux autres. Le public, capturé, captivé, l’écoutait avec une frémissante attention. Ca a été un beau moment. Francine, après la recontre, nous a emmené dîner, Alberto, Margarita, sa femme, Amélie et moi et une poignée d’amis. Nous avons pu ainsi continuer de tisser la soirée. Petits nœuds d’existence, larges points communs. Embrassades. Nous nous sommes promis de nous revoir. A Mexico d’abord. Mais quand ? On va s'écrire...