J'ai toussé toute la matinée. J'ai bu du Pulmosérum à pleines lampées. Je ne connais pas de sirop aussi répugnant à avaler. C'est mauvais, mais c'est efficace. J'étais transi aussi. Je me suis recouché tout habillé pour relire Jérôme de Jean-Pierre Martinet avant Jeux d'épreuves. Je dois à Sorin d'avoir découvert il y a quelques mois ce livre noir, si noir, désespérant comme jamais. L'histoire d'une errance épouvantablement triste. Ca commence mal. Ca finit mal. Le livre enroule le dégoût en écoeurant plaisir. Quelle incroyable expérience de lecture. Il a été publié la première fois en 1978. Martinet est mort à quarante-neuf ans en 1993. Je ne connais rien de cette époque qui ait cette force lourde, ce poids absolu. Avant? C'est une autre histoire... Pas de bus place Charles-Michel. Je me suis traîné à pieds jusqu'à Radio France dans un froid glacé. Retrouvé Nathalie aux Ondes quelques minutes avant le début de l'émission. A peine le temps de se réchauffer avec un café. Mais dans le studio, j'ai savouré le bonheur d'apporter un grand texte. Chacun était vraiment impressionné. Oh, ce sentiment de faire oeuvre utile. Quel dommage qu'au Monde personne ne semble décidé de me laisser publier le papier. En sortant, je suis passé à la quincaillerie acheter une mèche à métaux pour la perceuse de Marie. Je lui avais promis de régler son compte à la serrure de boîte aux lettres dont elle n'avait pas la clé. Depuis plusieurs mois, elle tentait de d'occuper celle de son voisin. Sans succès. Son nom était arraché tous les deux jours et le courrier repartait « Inconnu à l'adresse ». Elle m'attendait derrière son porche avec tout un attirail de cambrioleur au petit pied. Le petit verrou n'a pas résisté longtemps. Je lui ai installé une étiquette neuve, bricolé un peu la fermeture. Elle va enfin pouvoir recevoir ses lettres.