J’étais à Valence passé midi. Très largement en avance. J’ai marché au petit bonheur la chance pour échouer au Victor Hugo, une brasserie cossue du centre ville avec aux murs de très grandes reproductions de toiles de Tamara de Lempicka. J’ai déjeuné et fait traîner le temps en trois ou quatre cafés. Une, puis deux demi-bouteilles d’eau de Vals. J’ai arrangé mes notes. Relu Les adolescents troglodytes : Je jouais souvent à mourir quand j’étais petit garçon, je voulais qu’on me pleure. Emmanuelle Pagano est décidemment un auteur qui épingle mes replis. Elle arrivait d’Aubenas où elle enseigne dans un collège. Je l’ai retrouvée chez son fils de dix-sept ou dix-huit ans qui occupe un petit appartement dans le quartier de la gare. Foutoir étudiant et techno hardcore. Tu peux baisser un peu ? Nous nous sommes retranchés porte fermée à l’intérieur d’une pièce où séchait la lessive. Nous y avons bavardé une bonne heure. Elle, assise par terre sur un coussin, moi, installé sur une table basse en pin. Elle m’a raconté ses livres et sa vie dans tout un entrelacs de coïncidences, de failles, d’ombres portées. J’en ai reçu tous les échos. C’est que ce nécessaire étrange, ce tricotage du fortuit m’est vraiment familier. Mais le propos n’était pas là. Je vais essayer de me mettre au papier dès demain. A Carolles…