Le TGV jusqu'à Dijon, un vieux tortillard ensuite jusqu'à Besançon. J'étais attendu à la gare. L'hôtel, rue Moncey, puis une heure de battement. J'en ai profité pour acheter des affaires de toilette. Je m'étais aperçu en déballant la valise que j'avais oublié ma trousse en partant. Ca m'a fait tout drôle d'être ici. Je n'y étais pas revenu depuis que Marie était rentrée habiter Paris. Elle a passé deux ans à Besançon. J'ai remonté la rue des Granges jusqu'à l'immeuble où elle avait sa maisonnette de fond de cour. Deux pièces perchées en haut d'un escalier étroit. Impossible d'entrer : le code avait changé. Je me suis baladé dans le quartier. Attrapé quelques souvenirs au vol. Mais pas assez pour être nostalgique. Corine, mon accompagnatrice m'avait donné rendez-vous pour une première intervention à la médiathèque de Delle, une petite ville du Territoire de Belfort. Nous avons roulé une bonne heure en voiture. Juste le temps de faire connaissance et de se trouver, en éclats biographiques, quelques points communs. Le travail social, Senlis, les oiseaux, le goût de l'archive. Le débat, animé par Anne-Claude et Christelle, les deux bibliothécaires a été intime. Bienveillant. Très bienveillant. J'appréhendais vraiment de reparler de mes livres. et puis c'est venu, tout doucement. J'ai toute une poche de chagrin à crever en racontant autre chose. Le comment j'ai écrit, les lieux et les moments. Elles m'ont demandé de lire des passages. J'ai senti que ma voix se cassait un peu sur la Rue d'Avelghem. Peut-être parce que j'avais reçu trois minutes avant de commencer un coup de fil étonnamment à propos. La mairie de Roubaix m'appelait au sujet du certificat de décès de ma tante Agnès. Pourquoi demandez-vous ce document ? J'ai expliqué à l'employé que ma tante détenait la concession de mes grands-parents, Angèle et Joseph, au cimetière et que je voulais la reprendre. A mon nom. Oui, j'ai senti que j'éraillais, un peu, en disant devant les gens : Tant que je serai vivant, personne ne touchera à leur tombe.