J’ai eu deux rendez-vous coup sur coup au Rostand en fin de journée. J’ai écrit pas mal de lettres dans ce café et je continue de temps en temps à y faire de la correspondance. Je m’installe à une table du fond, en vue de la pendule, et je sors mon bloc, mes enveloppes. Au bout d’un moment, la table est entièrement envahie de papier froissé. Je n’aime pas les ratures. Je recommence au propre. En sortant, j’ai descendu la rue de Médicis. Côté Luxembourg... Les marronniers ont presque tous redressé leurs folioles. Dans une semaine à peine les panicules blanches et roses apparaîtront. Cela dure si peu. Chaque année je cours après ces instants. Les fleurs des marronniers, le blé en herbe. Je sais, tout cela c’est l’enfance. Les arbres du cours en face de la maison. Les champs contre l’orée de la forêt d’Halatte. N’empêche, chaque année j’ai l’impression de n’avoir rien vu. Ce sont des moments fragiles. Je vais faire attention.

Christine était avec Amélie. Je les ai retrouvées au Sauvignon. Il tombait une petite pluie fine. Pour pouvoir fumer, elles étaient quand même en terrasse. A peine protégées par l’auvent. J’ai aussi allumé une cigarette. Nous avons vu passer pas mal de gens avant d’aller dîner tous les trois au Palanquin. Toutes les conversations portaient sur le même sujet : et si c’était la fin du Monde ?