Les camélias défleurissent. Les jonquilles et les narcisses sont fanés. On ne voit presque plus de violettes, plus de ficaires. Dans le jardin, le tout premier printemps est déjà fini. Je guette les orchis au pied du sapin. Les jacinthes commencent à remplacer les primevères. La falaise est maintenant toute jaune des genêts et des ajoncs. Il y a tant de saisons dans une saison. Je suis passé devant (anciennement) chez Perron. De la maison, il ne reste plus qu’un tas de pierres. Un autre de ferrailles. Elle a été détruite en deux jours. C’était prévu. Depuis longtemps. Mais comme les choses traînaient, je me disais que, peut-être, la nouvelle propriétaire des lieux avait changé d’avis. Elle avait acheté l’endroit il y a quatre ou cinq ans. Refait entièrement, agrandi, la petite maison du gardien pour s’y installer. En attendant… Elle m’avait expliqué alors que son architecte lui avait déconseillé de se lancer dans la restauration de la villa. Mieux valait faire du neuf ! C’était pourtant un bâtiment XIXe magnifique, de cette architecture cossue des villégiatures de l’époque. Le dernier héritier, le fils Perron, n’avait rien entretenu. Il avait même fini par tout saccager. Pauvre maison abîmée, abandonnée, maintenant détruite. Ca me serre le cœur. Nous rêvions, Amélie et moi, d’un jour l’acheter. Un jour… Elle voulait en faire une résidence d’écrivains.