Beaujolais nouveau. Les cavistes de la rue Daguerre avaient tous sorti les bouteilles devant leurs boutiques. J’ai repensé à Alain, à Point de Vue, qui pour rien au monde n’aurait manqué fêter ce troisième jeudi de novembre. Avec lui, dès la fin de la matinée, le vin coulait à flots. C’était si joyeux. Nous nous sommes bien éloignés depuis. Il vit à Concarneau. Je ne téléphone pas, il ne répond pas au courrier. Nous nous étions croisés, tiens justement rue Daguerre, au printemps dernier. Il était de passage à Paris et faisait la tournée de ses bars familiers. Il avait jailli de chez Péret : J’espérais bien te voir par ici ! Amélie et moi étions en route, trainant nos valises, pour l’aeroport de Roissy (j’étais invité à l’Île Maurice pour le festival Confluences). Désolé Alain, pas le temps, pas le temps. Comment va-t-il aujourd’hui ? Je me suis arrêté à une terrasse et j’ai bu un verre à sa santé. Regardé l’étiquette : Christophe Paris, Domaine des Hauts de Buyon. Il vous plaît ? – Pas mal. En fait, je l’ai trouvé si bon que j’ai acheté deux bouteilles. Maureen venait à Paris pour un salon de la mercerie ou de la couture (sa nouvelle passion) porte de Versailles. Elle campait sur le canapé à la maison. Belle soirée. Maureen et Amélie n’en finissaient plus de bavardages, de refaire leurs souvenirs et le monde. Elles se connaissent depuis si longtemps et se voient si peu. Je les écoutais en figurant ravi. Apéritif au beaujolais, bien sûr. Puis nous avons dîné au petit bar à huîtres du poissonnier en haut de la rue. Pris le coup de l’étrier au Vin des rues en rentrant. Un orphéon jouait des airs à boire. J’aurais aimé qu’Emmanuel soit avec nous, lui qui, dans la journée, m’avait abreuvé des messages de sa détestation du beaujolais nouveau (il a eu, semble-t-il, de mauvaises expériences dont il n’a pas eu envie de se remettre). Qui sait s’il ne se serait pas ravisé ?