Marché à Granville avec Claire et Emmanuel. Pas mal déçus que la saison des saint-jacques ne commence que début octobre. Mais nous serons repartis ! Ils se sont rattrapés sur les homards et sur les huîtres, les praires, et les palourdes, et les bulots. Nous avons fait un sort aux homards dès midi. Juste grillés avec un beurre d’estragon. J’ai commencé à répondre aux vœux reçus hier. Il m’en est arrivé d’un peu partout. De proches. Du loin aussi. D’amis perdus de vue ou presque. Quand déjà était-ce cette dernière fois où nous nous nous étions parlé ? Et où, d’ailleurs ? Deux, trois lignes, doucement affectueuses. Attentives. Présentes. Mais, cette année encore, affaire d’époque, pas un seul mot écrit. Cela me reste un peu difficile. J’ai encore, j’ai toujours, de la réticence face à cette immédiateté des textos, des courriels. Ce mode d’écriture, maintenant totalement acquis et partagé, me semble si volatil. Pas de mémoire, pas de trace. Rien à garder à soi de personnel, de charnel. Il est devenu (presque) impossible d’entretenir une « vraie » correspondance, faite de pauses, de maturations, d’occasions. Des lettres où l’émotion se touche, se respire. Les larmes de Cyrano qui brouillent l’encre quand il écrit pour Christian à Roxane. Les fleurs glissées dans les enveloppes. Les phrases griffonées sur une nappe en papier. Oh, avoir le temps… Tout va trop vite. Et je suis si lent, si lent. Inadapté en fait. J’avais entamé un moment un échange avec une élève de première d’un lycée de l’Orne où j’étais intervenu. Mais, de courriel en courriel, je n’arrivais pas bien à suivre le rythme. Son rythme. Cela s’est éteint de ma faute, au bout d’un an, dans mon incapacité à savoir me servir de cette écriture immédiate. Je pense souvent à Adélie. Elle m’a adressé un message il y a peu : Tu ne me donnes plus aucune nouvelle. C’est triste, non ? Je vais essayer de lui répondre. Autrement.