Mercedes était à Paris pour la journée. Nous avons déjeuné ensemble chez Péret. On s’est toujours peu vus, on se voit moins encore depuis qu’elle et Esteban ont déménagé du côté de Meaux. Mais on se connaît depuis longtemps. Ce devait être en 2002. J’avais écrit un papier sur Lily de Daniel Arsand, l’histoire, troublante pour moi, d’un homme enquêtant sur la vie de sa mère, et j’avais reçu d’elle un petit mot très « reconnaissant », très touchant. Elle m’y expliquait que Daniel Arsand était un de ses amis, me disait combien elle trouvait que ma lecture de son texte lui paraissait juste et ajoutait plein de compliments encore. Des messages comme ça, mon Dieu, on n’en reçoit pas tous les jours. Nous nous sommes rencontrés quelques mois après, dans ce petit maillage des hasards qui me devient familier. Elle venait de publier, pour la rentrée, son deuxième roman chez Buchet : Suite et fin au Grand Condé. Chez Buchet aussi, j’avais tout juste signé le contrat de mon premier texte. La ballade de Lola sortait au mois de janvier. Les années ont filé. Nous nous sommes donnés des nouvelles. Elle ne va pas très bien aujourd’hui Mercedes. Esteban, dont la santé s’est terriblement dégradée, doit subir une très lourde opération en mars. Tu sais, m’explique-t-elle, c’est un fantastique espoir, mais je suis usée : la fatigue des trajets, les doubles, les triples journées. Elle m’a raccompagné rue Danville. A bientôt. On s’est embrassés.