Temps maussade. J’ai lu toute la journée. Découvert un très beau texte aux éditions de la Différence. Croquis-Démolition de Patricia Cottron-Daubigné. Ca parle, en mots simples, des fermetures d’usine, du temps gaché, des vies méprisées. Les mains sont restées serrées dans les poches. « On ne disait rien. » L’un après l’autre, les noms sont tombés. « C’est étrange comme on était calme. On ne disait rien. » Pourtant, on avait envie, on ne sait pas, de crier, de casser ; la tension était là dans notre silence, la colère tout au fond. C’étaient pas des fainéants, pas des tire-au-flanc qu’on nous arrachait. Des mecs bien qui bossaient. » A la tristesse, ils ajoutaient la honte, c’est ce qu’ils disaient « on a rien fait ». Ils sont restés silencieux, en bleu de travail, dans les odeurs d’huile et de dissolvants, avec des envies de pleurer. Il y avait le silence des machines et soi qui ne partait pas. J’ai rejoint Amélie place Paul-Painlevé. Nous étions invités chez Sabine et Stefano rue du Château-Landon. Stefano termine un guide des restaurants italiens à Paris. Il nous avait préparé des tripes à la romaine, de la salade de poulpe, juste tiède. Parlé cuisine et traductions. On entendait, au fond de l’appartement, les deux garçons, Lorenzo et Andrea (Lequel a quatre ans ? Lequel en a sept ?) qui tenaient de longues conversations d’un lit à l’autre dans le noir de leur chambre. Taisez-vous, c’est l’heure ! Rien à faire pour qu’ils s’endorment. Demain, ils risquent fort d’être fatigués…