Bien nommé Jeux « d’Epreuves »… J’ai effectué tout un gymkhana à la Maison de la radio, d’escaliers en couloirs, pour accéder au studio. J’enregistrais deux émissions à la suite. Retrouvé, pour la première, avec Joseph, Alexis, Baptiste Liger, Pierre Vavasseur. Et pour la suivante, Alexis à nouveau (j’aime bien quand il est là. Nous n’avons pas franchement les mêmes goûts, mais nous nous écoutons l’un l’autre et du coup, nous nous entendons bien…), et Clara, et Philippe Delaroche. Il m’en reste une suite d’impressions brouillonnes. Contrastées plutôt. Vavasseur défendait un gros volume de plus de cinq cents pages écrit par Marc Lambron, Carnet de Bal (3). J’avais complètement oublié d’ailleurs qu’il en existait deux autres. Il s’agit d’une succession de chroniques, de rencontres, de portraits de « célébrités ». On trouve ainsi Demy Moore, Kate Moss, Yves Saint-Laurent, Sophie Marceau, Michael Jackson, Romy Schneider… On a l’impression de feuilleter une pile de vieux Paris-Match ou de Figaro Madame, un après-midi pluvieux, invité chez des gens qu’on connaît mal. Enfin. J’ai été loin de me conduire de manière agressive ni avec Lambron, ni avec son livre. Pourtant, quelle volée de bois vert j’ai pris en retour par Pierre Vavasseur à propos de La mauvaise fortune, le livre de Bruno Vercier sur Charles-Louis Philippe. Il n’y a peut-être pas de relation de cause à effet, mais quand même… J’ai été choqué de l’entendre dire après qu’il ait confié connaître à peine le nom de Philippe que celui-ci faisait de la pudeur son fond de commerce et que sa littérature était une macération de l’humilité. Comment peut-on être aussi injuste... Malgré le soutien de Baptiste et la critique très « tempérée » d’Alexis, je m’en suis retrouvé désemparé. J’espère que je suis parvenu, quand même, à trouver les mots justes pour le défendre. Je présentais aussi Le pourceau, le diable et la putain de Marc Villemain chez Quidam. Un court texte, en mots crus, en chair tendre, faisant, à curieux rebours, quand viennent les moments de la déchéance du corps, le récit de la misanthropie nécessaire, de l’intolérance de tout autre que soi. Il s’est trouvé de beaux livres dans ces deux émissions. Les corbeaux d’Alang d’Erik Emptaz, L'été en enfer de Nicolas Chaudun et surtout Pink Floyd en rouge de Michele Mari, ce roman en 30 confessions, 53 témoignages, 27 lamentations dont 11 outre-mondaines, 6 interrogations, 3 exhortations, 15 rapports, une révélation et une contemplation. Je me souvenais de son autre titre traduit en français, Tout le fer de la tour Eiffel. Il y était question d’une drôle de partie d’échecs, entre-deux guerres, que disputaient dans Paris, Walter Benjamin et Marc Bloch contre le philologue allemand Erich Auerbach. Avec Pink Floyd en rouge, Mari nous entraîne au colin-maillard du rock britannique. Il se saisit des noms, des situations, des œuvres, et dans une précision infinie du détail, fait basculer la narration dans le nonsense. Il est sans doute des plus « carrolliens » des auteurs contemporains. L’étrangeté de l’énumération du sous-titre rappelle le Délire en huit épisodes ou crises de La chasse au Snark de Lewis Carroll. Pas besoin (surtout pas) d’être un fan du groupe pour se laisser happer. A bientôt, Joseph. J’ai rejoint à pas traînants la station de taxis. Retrouvé Amélie et Fiona au Bistrot de Paris. Fiona arrivait d’un séjour en Suède sur l’île de Gotland. Elle s’y était rendue pour son « roman des origines ». Elle prenait son avion du retour pour l’Australie le soir à Roissy. On se parle toujours entre parenthèses. Jamais longtemps. Jamais assez. How is Steve ? And Leo ? Je tends l’oreille. Je ne comprends que deux mots sur cinq. Heureusement, Amélie est là pour traduire. Irons-nous un jour à Melbourne, tous les deux ? Il faut que je file. I’m in rush (c’est ça ?). Take care. J’aime bien ces deux mots d’amitié. J’ai l’impression qu’ils enveloppent toute la distance. Je suis rentré en vitesse. J’avais rendez-vous à l’appartement avec Bernard Lehut. Il venait pour le « questions-réponses » des Livres ont la parole qu’il anime sur RTL. Je me suis senti fatigué. C’est vraiment gentil de t’être déplacé jusqu’ici.