Aujourd’hui Camille a dix ans. Elle a dû ouvrir les petits paquets et les lettres que nous lui avons fait parvenir au Mexique par Armelle et Tanguy. Trois fois rien. Quelques titres des Aventures d’Alice de Caroline Quine qu’elle avait découvert avec nous au printemps dernier. Nous nous sommes revus en juillet, avec ses parents et ses sœurs, au mariage de Marion et Jérôme à Menthon, puis deux jours à la fin de l’été à Carolles. C’est étrange comme la distance creuse davantage l’absence. Enfin, pour nous, s’entend. Nous l’avons eue au téléphone. Alors, comment te sens-tu ce matin ? (fichu décalage horaire. Si, c’était bien le matin…) Je pensais à ce que dit Alice (l’autre, la vraie…) après qu’elle vient de faire cette longue chute dans le terrier du lapin blanc. Un passage que je me répète si souvent. Mon Dieu ! Mon Dieu ! Comme tout est bizarre aujourd’hui ! Pourtant, hier, les choses se passaient normalement. Je me demande si on m’a changée pendant la nuit ? Voyons, réfléchissons : est-ce que j’étais bien la même quand je me suis levée ce matin ? Je crois me rappeler que je me suis sentie un peu différente. Mais, si je ne suis pas la même, la question qui se pose est la suivante : Qui diable puis-je bien être ? Ah, c’est là le grand problème ! Camille, au bout du fil, n’avait apparemment pas été bouleversée par le passage de sa dizaine. – Euh, c’est un anniversaire comme les autres. Non ? Elle avait raison. D’ailleurs, je n’ai aucun souvenir du jour de mes dix ans. Quant à l’année, elle avait été celle de mon entrée au collège en sixième. Mais ça c’est une autre histoire. Nous sommes allés déjeuner chez François pour marquer l’événement à notre manière. Soleil. J’ai taillé les rosiers en rentrant.