J’ai repris Sans rive de Bruno Krebs. Je cherche mes mots pour commencer le papier. Pas simple. C’est souvent ainsi lorsque je me sens trop proche. Le livre me fait l’effet d’une mise sans dessus dessous des souvenirs. Quand on s’acharne à retrouver une image, une phrase. Un visage ou un sentiment d’enfance. La mémoire s’exaspère. Ce n’est jamais le bon instant… Déjeuner avec Blandine à la Casa Bini. Les nouveautés, les programmes. Elle m’a donné des nouvelles de Phébus. J’ai repensé à cette maison, ce groupe. Cela m’est bien loin. J’y ai, de mon passage, des souvenirs aigres-gris. Après les premiers volumes de « Domaine public » chez Buchet à l’automne 2006, j’avais démarré pas mal de projets là-bas. On m’avait proposé de m’occuper du fonds. J’étais enthousiaste. Entre l’été 2008 et l’été 2009, j’ai même eu un bureau. Pas de salaire toutefois. C’était toujours : On verra, on verra. Et puis le directeur général d’alors a pris la décision de mettre fin à ma collection. Trop cher. Pas rentable. J’ai appris par la suite que personne n’avait réclamé au CNL les subventions que j’avais obtenues pour chacun des volumes. A cette même époque j’avais rédigé pour Phébus la préface des Mystères de l’île Saint-Louis de Roger de Beauvoir, un roman de cape et d’épée XIXe. Je me souviens que le suivi éditorial de cet ouvrage avait été une catastrophe. Au point que des deux récits, des deux tableaux qui formaient l’histoire, un seul avait été imprimé. Où était passé l’autre ? J’avais été voir ce même directeur général. On ne peut pas publier le livre comme ça ! Sa réponse avait été claire : Mais tout le monde s’en fiche… Je suis rentré à l’appartement en marchant jusqu’au Luxembourg. Pris un bus. J’ai commencé à rédiger mon papier. Amélie avait un rendez-vous le soir avec Nathalie au J’Go. Trop nuit. Trop froid. Je n’ai pas eu le courage de les rejoindre.