Il fallait que je retourne à Senlis. J’avais besoin de rafraîchir mes couleurs, mes images, mes souvenirs. Dans tout le temps de mes premiers essais d’écriture, j’avais l’impression de les avoir gâchés. Comme à chaque fois que je reviens, j’ai été écrasé d’émotions. Amélie a pris des photos, un peu partout où je lui demandais. Un détail, une fenêtre. J’ai griffonné dans mon carnet ce que j’ai pu, des croquis et des notes. Saint-Vincent, les rues, les monuments, le cimetière, la cathédrale à la fin de la grand-messe. La maison, à peine regardée. Le temps n’a pas passé. Pas du tout. Pas le moindre instant. Tout est intact là-bas. Ou plutôt, tout s’y remet en place. Tout se reforme, se rouvre. A la fin de journée, nous avons été jusqu’à Aumont. Cinq kilomètres à peine. Passé sous les grillages pour revoir la Sablière. Au retour, j’ai trouvé un chemin qui mène jusqu’au Tombray. Le bois Saint-Rieul, l’orée de la forêt, celle que je revois toujours dans mes rêves depuis que je l’ai quittée. Je traîne mon enfance comme une maladie.