Claude nous a fait faire un tour dans la campagne, pour nous montrer, de loin, les bords de la Truyère. Nous sommes en Margeride. L’Aubrac est au sud. Pas loin. Je connais ces paysages. Je les ai découverts quand j’avais vingt-trois ans. Zize, la mère de Dominique habitait en Aveyron à Saint-Félix-de-Sorgues, à un peu moins de 150 kilomètres d’ici. Aumont-Aubrac. Marvejols. Millau. Saint-Rome-de-Cernon. J’avais repensé à la route en apercevant du car, hier, le viaduc de Garabit. J’aimais bien ces gens. Frères et sœurs. Firmin, Jean-Louis, Michel, Catherine. Je ne suis plus bien sûr des prénoms. On s’est séparés, Dominique et moi. Ca n’avait pas duré longtemps. Je n’ai plus revu personne. Qu’est devenue Zize ? Sa maison de village, aux odeurs de bois frais coupé et d'herbes séchées… J’ai retrouvé les autres auteurs à la librairie. Régis Descott dont les intrigues des polars se nourrissent de l’histoire de la psychiatrie , le juge anti-terroriste Thiel, Simonetta Gregio avec qui j’avais participé en février dernier à une émission de télé. Elle venait de publier, à l’époque, chez Stock, Les mains nues, colin-maillard de la solitude et des passés amoureux qui reviennent où on ne les attend pas. Marie-Hélène Lafon aussi, ma « consoeur » de Buchet, venue en voisine, et qui présentait, en avant-première, L’annonce, à paraître début septembre. Extraordinaire roman du terroir où le terroir s’efface. Une épure des sentiments, une histoire de reconnaissance, de courage et de temps déjà fini. J’ai entendu quelqu’un dire en riant qu’elle était « le Giono du Cantal ». La formule m’est paru assez juste. Quelle profondeur. Quel ancrage. Jour de marché à Saint-Chély. Nous avons signé dans la rue derrière de petits guéridons. Beaucoup de monde et beaucoup de lecteurs. Antonie, la cousine d’Amélie qui travaille chez P.O.L. était en vacances tout près dans sa belle-famille. Elle est venue, accompagnée de Louise, sa fille de cinq ans, une petite blonde, gentillement espiègle et futée. Après le déjeuner, nouvelles signatures. Nous nous sommes échappés une heure. Je voulais voir voir le musée des papillons (3000 espèces rassemblées pendant toute sa vie par André Pagès, un entomologiste passionné). Mais malheureusement, le lieu venait de fermer, et définitivement, je crois, pour raison de santé. Tout va être vendu, paraît-il. Café littéraire, le soir, dans une salle du lycée hôtelier. Pascal Plat animait le débat avec proximité, attention. J’ai parlé avec plein de gens. Signé encore des livres. Nous avons retrouvé Antonie avec Vincent, son mari. Mais vous ne mangez rien, nous a dit Marie. C’est qu’il y avait un gigantesque buffet de charcuteries et de fromages du pays. Claude nous a raccompagnés à la ferme avec la Traction. Allez, à cette heure, je peux bien prendre la Départementale... Le ciel, tout noir, était envahi d’étoiles.