Nous avons déjeuné avec Jérôme avant de reprendre la route. Sur le chemin du retour, nous nous sommes arrêtés à Belbeuf pour voir Andrée. « Raine Dédée » comme l'appelait Didier que j'avais connu à Point de Vue où il était secrétaire de rédaction. Encore une drôle de coïncidence là aussi. Belbeuf, à côté de Rouen est le village où mon grand-oncle Emile possédait un chantier de péniches sur la Seine. Mon père y avait travaillé, jeune homme, dans les années vingt, avant de s'engager dans l'infanterie coloniale et de partir vers sa vie d'aventures. « Raine Dédée », la marraine de Didier, avait été l'amie d'enfance de Fernande, la fille d'Emile. Tous ces destins croisés en noeuds imperceptibles. Ca nous avait rapproché Didier et moi. J'étais venu plusieurs fois chez lui et Catherine. Fait la connaissance de leur fils Léo. Didier est mort, il y aura bientôt quatre ans. Andrée était contente de nous voir. Nous lui avons annoncé notre mariage. Elle nous a offert un doigt de muscat. L'apéritif sucré des vieilles dames. Revenez vite. Donnez-moi des nouvelles. Sa maison, aux Gravettes est tout au bord de la route. La circulation fait trembler les vitres. Elle y a toujours vécu. Ne veut pas la quitter. Les ponts et chaussées prévoient d'agrandir la chaussée. C'est là que devrait passer l'axe de contournement Est de Rouen. Alors, la maison... Dans le rétroviseur, je l'ai regardé agiter longtemps la main. Nous étions à Carolles à la nuit tombée.