J'ai déjeuné avec Marie rue Maleville. Elle travaillait ce lundi. Sa galerie fait l'inventaire. Elle aura quelques jours pour elle début janvier. Pas sûr que nous la verrons à Carolles comme prévu. De soirées en retrouvailles, son emploi du temps se complique. Qu'elle ne l'encombre pas avec un voyage supplémentaire, j'aime bien mieux la savoir contente avec ses amis. Le restaurant avait déployé son menu de fêtes. Impossible de l'éviter. Du coup nous nous sommes offert un petit Noël. Au moment du café, Marie m'a demandé quelque chose : elle ne veut plus apparaître dans mon journal. J'ai compris que le peu que j'avais raconté de nos rencontres l'avait mise mal à l'aise, quelquefois, avec certains. Et puis aussi, ça l'embête, voilà tout. Promis? - Promis. Nous sommes juste convenus de rapporter cette « dernière » conversation. Elle a repris son travail un rien en retard. A bientôt ma chérie... J'ai erré à pied autour de Saint-Augustin en la quittant. J'étais assez déboussolé. Je tiens la chronique de mes journées, en ligne, depuis le printemps dernier. Mon éditeur m'avait demandé à l'époque ce que je voulais « faire » sur le site de la maison. Je ne me voyais pas lire de vieux textes. J'ai eu cette idée. Cela faisait des années et des années que je griffonnais des carnets que je finissait toujours par jeter. Des confidences illisibles, inégales, espacées, et souvent exagérément désespérées. Pourquoi ne pas essayer d'y mettre un peu de rigueur. De devoir s'y astreindre. D'y être tenu surtout. L'exercice m'a permis de raccrocher l'écriture au moment où je pensais vraiment l'avoir perdue. Cette écriture des petits faits et des instants qui est la mienne, assurément. Sans le journal, il n'y aurait probablement pas eu ce livre qui sort en février. Raison pourquoi je continue... J'ai remonté le boulevard Malesherbes. Me suis arrêté acheter du thé chez Betjeman & Barton. Toujours le même mélange : 2/3 d'Assam Greenwood, 1/3 de thé aromatisé à l'orange amère. Je l'aime infusé noir avec un fond de lait dans la tasse. Je connais cette boutique depuis 1980, quand je travaillais rue de Lisbonne. Je crois que je n'y retournerai plus. Je me contenterai de leur système de vente sur internet. Depuis la dernière fois que je suis passé, tout a été sottement mis au goût du jour. Peinture grise sur les boiseries de chêne et aluminium finement rayé pour les grandes boites à thé autrefois rouges et vertes. Plus aucun charme. Les imbéciles...