J’ai déjeuné avec Anne au Perron. Mon papier sur le Céline Minard n’est toujours pas sorti. J’avais été le premier à chroniquer Le dernier monde en 2007, je serai probablement le dernier pour Bastard Battle. Une poêlée de palourdes, des pâtes à la poutargue. Nous avons glissé rapidement sur le sujet. Elle m’avait apporté une biographie d’Hélène Bessette. Je l’avais découverte il y a à peine plus d’un an, quand Léo Scheer, déjà, avait édité d’elle un inédit, Le bonheur de la nuit. Rien lu avant. J’avais trouvé au hasard, un peu plus tard, chez un libraire d’occasion, La route bleue et N’avez-vous pas froid. J’en suis là. Je sais très peu de choses d’elle. Je ne suis que dans le pressentiment et le désir d’aller plus loin. Elle a été un temps institutrice à Roubaix. J’aimerais bien trouver dans ce prétexte quelques fils à nouer. J’ai rejoint Agnès au Rostand vers 16h00. La semaine dernière après un rendez-vous raté, elle m’avait fait passer la dernière version du manuscrit que nous avions travaillé et retravaillé ensemble pendant des mois. Aujourd’hui, il ressemble vraiment à ce qu’elle voulait faire. Reste à le titrer, à le séquencer, à l’ordonner un peu. Trouverons-nous quelqu’un chez qui le publier ? Je suis rentré chez Buchet en traversant le Luxembourg. C’est le vilain automne. Les tas des feuilles sales de la pluie d’hier étaient alignés, rassemblés au râteau, grumeleux de marrons racornis. Au troisième, je n’ai pas résisté : j’ai flanqué un grand coup de pied dedans.

Rue des Canettes, mes correspondants du cercle Anna de Noailles m’attendaient. Ils avaient avec eux la copie du livre que j’espérais : La Domination, un texte de 1905, racontant à mots couverts la relation de la belle comtesse avec Barrès. Il ne me manque plus grand chose pour proposer un choix. Je suis reparti vite. J’étais attendu aux studios Harcourt pour la remise du prix Carrefour du premier roman. Katherine Pancol m’avait demandé cet été de faire partie du jury (des « professionnels » et des lecteurs). Comme je ne pouvais pas participer au déjeuner de délibération du début octobre, je lui avais fait parvenir dans un long mail mes remarques sur les livres en concurrence. Etrange liste. Quelques titres commerciaux et bâclés et deux autres textes, pour le coup, littéraires. Ce sont eux qui se sont retrouvés finalistes. Comme quoi il ne faut jamais tout à fait désespérer. J’avais donné ma voix au Passé devant soi de Gilbert Gatoré, la majorité est allée aux Constellations du hasard de Valérie Boronad. Rien à dire : le pire avait été évité… Mais, sans doute était-ce lié aux mésaventures de Jérôme avec son enseigne, j’ai trouvé la soirée fausse, clinquante. Le directeur des hypermarchés pérorait sur quelque chose comme Carrefour, première librairie de France. J’avais beau me forcer, je ne me sentais pas à ma place. Une erreur de casting. Heureusement, Amélie était là. Nous avons bavardé avec Cyrielle, dépêchée par Phébus pour représenter Gatoré. Anny aussi, qui entourait la lauréate avec Geneviève Perrin, son éditrice chez Belfond. Demain, c’est Carolles. Nous sommes vite rentrés.