J’ai cavalé à Censier. Les photocopies à faire. Le cours à réordonner un peu. Ils s’accrochent mes étudiants. Une jeune fille est venue me voir à la fin pour me demander des conseils de cursus, d’orientation. J’espère ne pas avoir été trop évasif. Je me suis aperçu en lui répondant que je n’avais la mémoire que de ce qu’il ne fallait pas faire. Comment peut-on dire à quelqu’un de vingt ans que l’on dérive, si facilement, que peut laisser glisser des pans entiers de sa vie, qu’il n’est pas facile d’aller vers ce qu’on est. Et qu’on s’en rend compte parfois un peu tard. Vieux propos. Belle jeunesse. Il me reste tant de projets. Il y a si peu de temps que j’ai compris que je pouvais les réaliser. Pour de vrai... Amélie m’a appelé. Jérôme vient d’être mis à pied de sa « librairie » du centre Leclerc de Hyères. C’est désolant mais pas très étonnant. Cela traduit simplement l’opinion de ces grandes surfaces sur la culture et les gens qu’ils emploient. Tête de gondole et bas de rayon. Pour eux, tout est du consommable. Je sais bien que cela ne le consolera pas mais il était trop bien, vraiment trop bien pour eux.