C'était la rentrée à Censier aujourd'hui et j'étais tout fébrile, énervé et content. J'ai en charge une cinquantaine d'étudiants, en deux groupes. Cette année, je les garde deux semestres entiers. Je voyais Marie Sizun, juste après mes cours, pour un portrait, encore dans Le Pèlerin. Elle publie un troisième livre chez Arléa, Jeux croisés. Le précédent, La femme de l'Allemand, m'avait été, d'emblée, incroyablement proche. Dans cette écriture en effleure, qui dit tout, sans rien souligner. Et puis, j'avais découvert, à notre première rencontre, qu'elle avait été autrefois une amie de mon oncle Georges, à Tourcoing, où elle enseignait. J'aime tant m'agripper à ces fragiles passerelles. Je ne pense vraiment pas qu'on les trouve par hasard. Elle habite un appartement du quartier Montparnasse, au dernier étage, avec des fenêtres qui s'ouvrent sur tout Paris. On a l'impression d'être dans un ballon captif. Elle m'avait préparé une petite tarte aux pommes. Servi un verre de gewürztraminer. Je suis resté plus d'une heure. Difficile de la faire parler d'elle. Elle est envahie de silences, d'inquiétudes, de pudeurs. J'avais l'impression de la mettre sans cesse mal à l'aise. En fait, c'était peut-être moi qui l'étais. J'ai retrouvé Amélie, marché Saint-Germain. Nous avions prévu de prendre un verre avec Christine. Nous en avons bu plusieurs. On vient de lui enlever la direction de la littérature française au Monde des Livres. Je trouve cela simplement injuste. Rien d'autre à ajouter.