Astrid et Paul-Edouard sont partis après déjeuner. Le matin, je les ai emmenés sur la lande. Nous avons longé le sentier des douaniers jusqu’à l’escalier de plage. Je les ai laissé descendre seuls (la chienne est interdite de bord de mer pendant les mois d’été). Ils étaient sous le charme. Quelle chance tu as ! L’enthousiasme de ceux qui nous rendent visite, me la fait mesurer à chaque fois. Je redécouvre combien Carolles est un paradis délicat et fragile. Et puis, je sais maintenant que j’y suis chez moi. J’ai mis du temps. Il a fallu que j’apprivoise toute une généalogie du très loin. Que je me réconcilie avec l’héritage de mon père. Que je retrouve ceux qui, à Sainte-Pience, à Bourguenolles, poussaient la charrue à la fin du XVIe siècle. Qu’ils me reconnaissent en quelque sorte. Chez moi, bien sûr. Mais surtout, grâce à Amélie, à son attachement immédiat à l’endroit, cela est devenu « chez nous ». Carolles. Seule me manque la forêt de mon enfance, le grand couvert des chênes et des hêtres, les sentiers, la mousse épaisse, le bruit des bêtes et les oiseaux cachés. Je ne m’y promène plus qu’en songe.