Anniversaire de la mort de Lewis Carroll. A chaque fois, je m’arrête sur la date. 123 ans cette année, ça ne fait pas un compte rond. Ce qui tombe juste par contre, c’est son âge à ce 14 janvier 1898. J’ai le même aujourd’hui. Il a été emporté par une mauvaise grippe. Cela fait plus de vingt ans que je me suis rendu sur sa tombe à Guildford. J’aimerais bien, je voudrais, refaire le voyage. Revenir à aussi Oxford, à Eastbourne. Aller à Daresbury. Ce n’est pas demain la veille avec, justement, cette épidémie de grippe internationale. De nouvelles « vagues », de nouvelles « souches » de cette étrange infection arrivent paraît-il de partout. Et le monde semble avoir définitivement sombré dans la folie inquiète. Confinement, couvre-feu, interdictions, consignes sanitaires. J’étais à Paris ces jours derniers. Chacun fait semblant, mais tout est comme pétrifié. Les gens circulent un masque sur le visage. Les cafés, les restaurants, les cinémas, les musées sont fermés. Sinistre. J’ai vu Bruno Genevray (j’avais dû repousser nos rendez-vous d’octobre et de décembre) et je suis allé (il était temps) chez le coiffeur. J’ai aussi réussi à déjeuner avec Pascale. A la maison, puisqu’il est impossible de se retrouver où que ce soit en ville. J’avais fait ouvrir deux douzaines de Gillardeau par le poissonnier de la rue Daguerre. Elle avait apporté du menetou-salon. Un bail que nous n’avions pas passé un moment ensemble. On s’entend bien tous les deux. Je me suis retrouvé dans la nouvelle année sans bien m’en rendre compte. Marie est venue quelques jours à Carolles. Elle est arrivée le 31. Nous avons veillé jusqu’à minuit pour la forme. Au lit tout de suite après. Le soir de Noël, nous étions chez Yann et Brigitte. Couchés de bonne heure là encore. Il va maintenant falloir se réveiller. Autrement, j’ai enfin touché ma retraite. Dieu que ça a été long et compliqué. Comme je m’en doutais bien, c’est très loin d’être le Pérou, mais cela va me faire un fixe qui me permettra d’affronter mes factures ordinaires sans frémir. Je vais continuer bien sûr à travailler… J’ai rendu à Raphaëlle un papier sur Aujourd’hui de Dominique Fabre. Terminé pour Macha une petite chronique de La chanson de Passavant de Sureau qui reparaît en Poésie/Gallimard. Pour lundi, je dois écrire sur Cimetière d’étoiles de Morgiève. Fait un peu de courrier. Pas de vœux. A la bonne cinquantaine de cartes que nous avions expédié pour Noël, nous n’avons reçu que cinq ou six réponses. J’ai eu des nouvelles de François. Il a écrit à ma belle-sœur Noëlle pour tenter de récupérer le « stick » que son père, le capitaine Félix Broche, avait donné en gage d’amitié au mien, à Nouméa, en quittant le Bataillon du Pacifique avant qu'il ne tombe pour la France à Bir-Hakeim. Il veut en faire don au musée de l’Ordre de la Libération. Je sais que cette courte cravache gainée de cuir marron est chez elle. Après le décès de ma mère, mon demi-frère Jean et elle étaient venus emporter pas mal d’affaires de la « succession » de mon père. Ce petit talisman en faisait partie. Jean avait d’ailleurs insisté pour le prendre. Il est mort en 2010. A plusieurs reprises, j’ai tenté de récupérer le journal de mon père, quelques souvenirs. Et cette cravache aussi. Noëlle n’a jamais répondu à mes lettres. A François, elle prétend qu’elle ne sait pas de quoi il s’agit. Ca me laisse sans voix. J’ai de la peine pour lui.