J’ai fermé la maison. Après avoir, rituellement, fait le tour des pièces, pour me convaincre de n’avoir rien oublié, rien laissé traîner. Je ne me défais pas de cette crainte obsessionnelle d’avoir laissé une ampoule allumée ou l’eau des fleurs croupir dans un vase. Mais j’ai beau vérifier, je sais bien que le doute subsistera quand même. Il y a longtemps que j’apprivoise mes petites pathologies. Juste avant de partir, j’ai déposé l’Enfant Jésus dans la crèche, entre le bœuf et l’âne. Nous ne serons pas là le 24 au soir. Nous allons passer deux semaines au Mexique. Claire et Emmanuel pour leurs cinquante ans de mariage invitent tout le monde à un séjour sur une plage (paradisiaque, paraît-il) de Basse Californie suivie d’une croisière en mer de Cortés. Tout le monde, c’est à dire Virginie, Marcus et les quatre filles, Jérôme et ses enfants, et Amélie et moi. La perspective de me retrouver ainsi en famille à l’autre bout du monde m’effraie un peu. Mais cela ravit Amélie et cela me suffit. Après tout, cela me fera tourner la page de l’année. Je reprendrais mes angoisses juste plus tard. Angoisses d’argent surtout. Car je touche le fond. Là-bas, si loin de tout, avec les rires de mes nièces, j’espère bien balayer tout cela. J’emporte un gros cahier pour tenir le journal de cette parenthèse. Que Dieu nous garde.