J’ai été toute la matinée dans Bruno Durocher. Les quatre volumes de l'Oeuvre complète. On peut écrire un poème comme de la dentelle/ l’été les parfums les jasmins/ la douceur de l’existence/les lèvres tremblantes/ comme un dieu qui voyage sur une sauterelle/ comme les larmes/ de la virginité/ mais voici que le crépuscule couvre la lumière/ et je vois ton visage qui me prend la joie/ dans l’angoisse des dernières promenades/ je sculpte les instants. C’est cette mélancolie-là qui m’attrape, qui m’accroche. J’ai repensé à mes seize, dix-sept ans, à cette rencontre avec lui rue sainte-Marthe, et à ce recueil qu’il m’avait publié. A ce sentiment, cœur gonflé, que j’allais devenir moi-même. Oui, je lui dois d’écrire (mal, peu), mais d’écrire, aujourd’hui. Toujours. Je suis arrivé chez Caractères tout entortillé de souvenirs. J’avais rendez-vous avec Françoise Estèbe qui voulait mon témoignage pour le numéro d’Une vie, une œuvre qu’elle lui consacre sur France Culture. Elle a enregistré pendant plus d’une heure. Je ne sais plus ce que j’ai dit. Embrassé Nicole. Tu m’appelles ? Je suis rentré à l’appartement. Amélie était au prix des lectrices de Elle. Eva Dolan, son auteur chez Liana Levi, l’avait obtenu, dans la catégorie polars, pour Les chemins de la haine. Aucune envie de m’y rendre. Je ne voulais pas y croiser Olivia de Lamberterie qui avait du jour au lendemain décidé de se passer de mes services, et qui, depuis presque un an, ne répondait à aucun courrier. Vraiment pas envie d’être un peu plus humilié. J’ai téléphoné à Pascale : Tu es libre pour dîner ?