Richard Morgiève est d’accord pour venir à Carolles fin août pour nos Rencontres littéraires. Je suis ravi. Mieux, ça me fait un immense plaisir. Parce qu’il est un grand écrivain. Et aussi parce qu’il est quelqu’un de bien. Nous nous sommes croisés et recroisés. Je l’avais rencontré la première fois, en 2004 ou 2005. Il venait de publier Vertig chez Denoël, le roman de la disparition de soi-même dans soi-même, comme il m’avait dit. Un gigantesque foutoir intime en fait. Son personnage lutte pour ne pas se laisser détruire par un virus informatique appelé Moby Dick. Un grand coup de mâchoires et tout peut être englouti. À commencer par la conscience. Le voilà qui lutte fouillant chaque recoin de son passé connu. Et comme cela ne suffit pas, allant chercher plus loin dans les profondeurs du non-dit, du non-su, du non-compris. Une quête abyssale menée avec l’énergie du désespoir. Depuis une trentaine de livres, il s’agite Morgiève. Il se débat. Il a fait avec sa déchirure d’orphelin. Sa mère morte quand il avait sept ans. Le suicide de son père à treize. Lui qui a voulu contenir, retenir, le flux de son œuvre, en ordonnant ses textes dans des séries de diptyques, de triptyques, de trilogies, le laisse échapper sans réserve dans Les hommes qui paraît à la rentrée. Une histoire de mauvais garçons et de bonnes étoiles où tout se rejoint, où tout se rassemble. Où tout est emporté. Raphaëlle devrait me confier le papier pour Le Monde. Mais je suis surtout content de le revoir après ces années. J’ai emmené la chienne chez le vétérinaire. Cela faisait un moment que son œil droit coulait. En fait, son canal lacrymal est bouché. C’est la race, m’a dit la jeune femme qui nous a reçus (ce qui veut dire que ses yeux tombants et rouges qui lui donnent en permanence l’air mélancolique, ramassent toutes les cochonneries possibles). Rien de grave. Elle a subi une minuscule intervention qu’elle a bravement supporté. Et je dois lui administrer un collyre pendant une semaine.