J’avais rendez-vous rue Jacob avec Lola Nicolle. Elle lance à l’Iconoclaste une série de livres autour de la nature. Vaste sujet, mais son approche se veut sensible, attentive aux correspondances, aux détails. Elle avait pensé que je serais peut-être intéressé et en avait parlé à Amélie. De fait j’avais réfléchi. Il y a longtemps que je voudrais raconter quelque chose autour de toutes ces plantules que depuis des années j’arrache dans les jardins des maisons d’écrivains, sur les tombes, de ces boutures sentimentales que je rapporte de voyage et que j’installe, en pots, dans le koetsch, comme une petite collection de souvenirs en serre. Ca pourrait s’appeler Le baobab de Tartarin (Oh ! le jardin de Tartarin, il n’y en avait pas deux comme celui-là en Europe. Pas un arbre du pays, pas une fleur de France ; rien que des plantes exotiques, des gommiers, des calebassiers, des cotonniers, des cocotiers, des manguiers, des bananiers, des palmiers, un baobab, des nopals, des cactus, des figuiers de Barbarie, à se croire en pleine Afrique centrale, à dix mille lieues de Tarascon. Tout cela, bien entendu, n’était pas de grandeur naturelle, ainsi les cocotiers n’étaient guère plus gros que des betteraves, et le baobab (arbre géant, arbor gigantea) tenait à l’aise dans un pot de réséda ; mais c’est égal ! pour Tarascon, c’était déjà bien joli…) Elle a aimé le projet. J’aimerais bien m’y mettre. Mais je lui ai rappelé que je dois (avant) rendre mon livre chez Stock. Et que si je continue de tourner en rond dans ce roman de la vie de mon père, je ne suis pas prêt d’écrire mon Baobab. Déjeuner avec Pascale chez Marcel. Je l’ai raccompagnée (en voiture) jusqu’à la rue des Canettes. J’y ai retrouvé Alain Galan qui avait fait le déplacement à Paris pour un festival du livre. Nous avons bavardé un peu étrangement dans un bureau de Buchet-Chastel. Un sorte de parenthèse, comme si nous nous voyions dans un buffet de gare, entre deux trains. Je ne sais pas bavarder. J’ai le sentiment de n’être pas parvenu à dire grand chose. Pourtant j’ai un vrai élan d’affection pour lui. Je nous trouve bien des préoccupations communes. Une affinité. Une « fraternité » d’espèce. La Harpe était couchée à ses pieds. Elle levait la tête de l’un à l’autre. Attentive, confiante. J’ai rejoint Amélie pour faire quelques courses rue Daguerre. Nous avions Delphine et Françoise–Marie à dîner.