J’ai relu, en prenant des notes, Comment gagner sa vie honnêtement de Jean Rouaud. Joseph m’a commandé le papier pour Marianne. Je dois le rendre demain. Rouaud a emprunté le titre de son livre au Journal de Henry David Thoreau. Il s’agit à nouveau ici d’un de ses retours en arrière. Les souvenirs s’agrippent à ses jours d’aujourd’hui. Blessures de l’enfance, chemins d’adolescence. Plus on avance avec lui, plus les certitudes deviennent instables. Comment gagner sa vie honnêtement est le premier tome d’un cycle que Jean Rouaud a choisi d’appeller La vie poétique. Il y déroule le récit de son colin-maillard avec la vocation littéraire. Tout commence peut-être en 1968, l’année de ses seize ans... J’ai avancé un peu dans le courrier, mais je n’ai toujours pas fini d’envoyer les vœux. Pas plus que d’y répondre. Françoise-Marie et Delphine sont venues dîner à la maison. Delphine part la semaine prochaine en Inde, à Bombay. J’ai toujours là-bas, ma « filleule », Anita. En novembre, j’avais reçu sa photo avec un petit mot de Pierre Péan. Elle se porte bien et poursuit ses etudes. Naturellement, depuis votre venue, elle a grandi. Je l’avais parrainée en 2002 comme je faisais un reportage sur l’association qu’avait créée Pierre pour l’éducation des filles. Quel âge avait-elle ? Quatre ans ? Cinq ans ? Elle vivait avec sa famille, des chiffonniers, dans le bidonville de Malad. Qu’est-ce que je peux faire aujourd’hui pour elle… Ce que je lui avais laissé à l’époque était encore, il y a peu, suffisant pour acheter l’indispensable, le nécessaire. Ses parents refusaient toute autre aide. Delphine se chargera peut-être d’une bricole, d’un peu d’argent et de me donner d'immédiates nouvelles...