Cinq heures et demi du matin. Je conduisais Amélie à la gare. A Jullouville, devant la mairie, un contrôle de gendarmerie. Coupez le moteur. Montrez-moi les papiers du véhicule. Quand je pense que j’avais hésité à les prendre. Ca n’a pas duré longtemps, nous étions en règle. J’avais roulé doucement, nous avions nos ceintures de sécurité… N’empêche, je n’étais pas à l’aise en repartant. Qu’est-ce qu’ils font là, avant l’aube, sur cette route déserte où l’on ne croise que les camions de ramassage des ordures ? Ce sentiment d’être soumis, silencieux et craintif. Forcément coupable de quelque chose. Nous avions mal dormi. Déjà épuisés au réveil. Amélie s’est pelotonnée dans son siège, contre la vitre. J’ai regardé le train s’éloigner. Remonté les quais tout seul. Les trottoirs de Granville étaient jonchés des confettis du carnaval d’hier. Je suis passé par le port. Croisé trois fêtards déguisés. Au retour, pas une seule voiture. Les pandores étaient au même endroit. Ils m’ont à nouveau arrêté. J’ai bien cru que cela allait recommencer. Mais l’un a dit aux autres : C’est fait, je l’ai vu. Et à moi : Circulez ! Toujours nuit. Je me suis fait couler un café à la maison. J’étais tout nauséeux d’ennui et de tristesse.