Je n’ai rien pu retenir de la journée. Elle s’est dispersée comme des feuilles de papier dans un coup de vent de rue à la terrasse d’un café. En voulant rattraper celles qui partent, on lève la main de dessus les autres qui, du coup, s’envolent à leur tour. On n’en récupère que la moitié. Les feuillets en désordre et tachés. J’ai commencé cent bricoles que j’ai abandonnées. Tout est resté à l’état de brouillon. J’aurais mieux fait simplement de ranger l’appartement. Il y règne un désordre insensé. Les livres se glissent partout. Dans le lit, la salle de bains, la cuisine, les toilettes. Ils se serrent en rangées touffues dans les étagères, se cachent au milieu du linge dans les placards, s’entassent en pile par terre. Et ça enfle, ça enfle. Cela me fait penser à cette pièce de Ionesco, Amédée ou comment s’en débarrasser… Nous en donnons beaucoup. Nous en emmenons à chaque fois à Carolles. En fait, nous voudrions tout lire, nous voudrions tout garder.

Je me suis rappelé in extremis que je devais voir Brigitte dans l’après-midi. J’oublie de plus en plus de noter… Nous avons pris un verre place de la Madeleine. Un mi-chemin de métro sur la ligne 12. Elle ne va pas très fort Brigitte. Ca se passe mal chez Larousse. Elle est en arrêt maladie, épuisée, angoissée. Elle m’a confié le manuscrit d’un de ses amis. Je vais le lire pour la semaine prochaine. Cela donnera une occasion de nous revoir et de pouvoir parler d’autre chose, d'essayer de la distraire un peu de ses préoccupations. Je l’ai quittée pour aller chez Buchet. J’ai revu les épreuves de mon livre avec Simone. Fait quelques dernières corrections. Amélie m’a rejoint Marché Saint-Germain. Comme le frigo était vide à la maison, nous avons décidé d’aller manger un morceau avant de rentrer. A l’angle de la rue Montfaucon... Une mauvaise pizza. Un mauvais italien. C’était une mauvaise idée.