On aurait pu presque voir l’herbe pousser sous la pluie. Elle est tombée en rideau tiède sans discontinuer aujourd’hui. Le jardin s’agite, s’ébroue, s’étend, se liane dans cette humidité.

Le livre ne bouge pas. J’ai retrouvé des lettres de ma mère. Elle m’écrivait en 1989 : Je me suis parfois demandé avec angoisse si j’avais pris la bonne route, j’ai souffert de cette angoisse moralement et aussi physiquement. Si j’essaie de retrouver des images, en même temps que le souvenir, l’angoisse remonte à la surface. Oh, c’est tellement au creux de ce que j’essaie de faire...

J’attendais Noëlle pour dîner. Nous nous sommes racontés un peu nos histoires. La soirée se filait un rien mélancolique. Nous l’avons rebrodée avec des noms de roses anciennes, des projets de boutures, des tailles d’hortensias. Je lui ai donné toutes les aiguilles à tricoter de ma mère. Ici, personne ne sait s’en servir. Je crois qu’elle ne pouvaient pas passer dans de meilleures mains.